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À la découverte des microparticules du milieu marin

Par Dodie Sanders et Katelyn Hunt

Traduction par Maria Romero

Les débris marins qui s’entassent dans les océans, dans les estuaires et sur les plages constituent un défi environnemental important et de plus en plus urgent. Tout comme l’augmentation du niveau de la mer et l’acidification des océans, l’accumulation de débris représente un des principaux enjeux du 21e siècle1. En plus de perturber la faune et la flore de nos mers (risque d’emmêlement et d’ingestion), les débris marins d’origine humaine affectent, entre autres, la santé, la sécurité (résidus médicaux, produits chimiques toxiques) et l’économie (coûts élevés pour les retirer). Ils sont constitués, pour la plupart, de matières plastiques dont le temps de dégradation, habituellement très long, dépendra de leur composition et des conditions réunies pour favoriser leur dégradation. Par exemple, les plastiques polymères, très résistants, ne se désagrègent pas facilement, tandis que les microplastiques se décomposent en minuscules particules lorsqu’ils sont exposés à la lumière. Les débris marins se trouvent partout dans les océans et sur le littoral; ils créent, par conséquent, des problèmes à très grande échelle.

La propagation de ces déchets peut cependant être évitée grâce à l’évolution des comportements de la société, à l’adoption de lois par les gouvernements et aux bonnes habitudes des citoyens. La bouleversante couverture médiatique du tsunami montrant débris et îlots d’ordures au milieu de l’océan a sensibilisé la population à l’enjeu environnemental et incité des bénévoles à s’organiser pour nettoyer les plages de certaines côtes. Il faudra toutefois en faire plus pour susciter l’intérêt de la population. La sensibilisation commence d’ailleurs par la diffusion d’information appropriée, qui couvre les sources des débris et les moyens à mettre en œuvre pour les réduire.

Ces efforts de nettoyage sont louables, mais ne tiennent pas compte d’un point important — et méconnu : les composants des débris. Désormais omniprésents dans le milieu marin, les microplastiques (particules dont la dimension est inférieure à 5 mm) proviennent d’ingrédients utilisés dans la fabrication de cosmétiques, d’exfoliants et d’autres produits commerciaux rejetés dans les égouts quotidiennement.

Comment pouvons-nous sensibiliser les citoyens à la présence de débris marins ou de microplastiques, véritable enjeu mondial actuel? Lorsqu’ils sont centrés sur la pratique, les programmes de conservation deviennent des outils essentiels pour encourager la conscience écologique et la bonne gestion de l’environnement chez les jeunes générations, qui font face à des défis environnementaux d’envergure. C’est pourquoi nous, les auteures de cet article, avons développé une formation relative à la protection de l’environnement et désirons la partager avec vous. Axée sur l’étude des débris marins du littoral, cette formation vient soutenir les efforts déployés jusqu’à maintenant.

En outre, pour les élèves qui y participent, l’étude des débris marins demeure un outil précieux de motivation et de sensibilisation à mesure que leurs expériences d’apprentissage mettent en évidence la présence de ces débris dans les systèmes côtiers. Les participants passent alors d’un état de sensibilisation à un état de compréhension des impacts de l’activité humaine; cette transition leur donne l’occasion de poser des actions concrètes (élimination des débris marins) dans le but d’améliorer la qualité de leur environnement. Ces expériences incitent les participants à prendre conscience, d’une part, de leur relation avec l’environnement au quotidien, et, d’autre part, du lien étroit unissant l’humanité et l’interface terre-eau. De plus, les élèves sont amenés à réfléchir à la façon dont des changements positifs dans leurs habitudes peuvent prévenir l’entrée des débris dans le milieu marin. Notons que ces changements incluent de réduire l’utilisation d’articles jetables, de réutiliser et recycler des articles conçus pour durer, et de s’engager dans les efforts de nettoyage pour l’élimination des débris de l’écosystème marin. En somme, les relevés assurés sur le littoral constituent, auprès des citoyens, un outil de formation dans le but de faire face aux problèmes de pollution causés par les déchets marins. Cet outil permet également la réduction de la quantité de débris dans les habitats d’une région donnée grâce à la surveillance des plages et des marais salés. Il sert aussi à expliquer l’importance de la gestion et de la cueillette de données pour les scientifiques qui, eux, s’en serviront pour apporter une meilleure compréhension du phénomène d’accumulation des débris sur le littoral et dans le milieu marin.

Les élèves ont livré, ci-après, leurs premières impressions après avoir relevé la présence de débris marins dans un marais salé de leur région :

  • “Je n’aurais jamais imaginé qu’il y avait autant de déchets dans un marais salé.”
  • “J’ai été surpris de récupérer toute cette quantité de débris marins dans un lieu si petit.”
  • “Nous avons trouvé beaucoup de mousses plastiques.”

Dans les activités suivantes, nous aborderons la question des microplastiques, le polluant invisible dont nous avons parlé précédemment. Précisons que ce ne sont pas tous les enseignants qui peuvent amener leurs élèves sur le terrain pour effectuer une analyse des débris du littoral. C’est pourquoi nous avons conçu une activité en classe inspirée d’une méthode d’évaluation sur le terrain, développée conjointement par le professeur Richard Jahnke et le Port Townsend Marine Science Center. Dans cette activité, les élèves réalisent une étude pour examiner l’abondance relative des microparticules et leur répartition dans l’écosystème marin à l’aide d’un transect de plage. Écologique et essentiel, le relevé par transect est un excellent outil pour déterminer les changements qui se produisent le long d’une surface linéaire. Grâce à ce dernier, les élèves identifient et comptent le nombre de microparticules présentes dans un échantillon de sable; puis, ils rapportent leurs données sur des graphiques et échangent leurs résultats avec ceux de leurs camarades. Ils sont alors en mesure d’évaluer les changements selon la quantité et le type de microparticules trouvées, puis peuvent par la suite réfléchir aux impacts de ces microparticules sur le système aquatique et sur les organismes qui y vivent. Fait plus important encore, cette activité offre aux élèves l’occasion d’échanger des points de vue sur les habitudes à adopter dans leur vie quotidienne pour prévenir l’introduction de débris dans l’environnement marin. La technique de l’apprentissage par l’expérience a démontré une augmentation de l’intérêt pour les matières communément désignées par l’acronyme STEM (science, technologie, ingénierie et mathématiques); c’est pourquoi nous croyons que cette activité représente le vecteur idéal pour permettre aux participants de rester enthousiastes, confiants, motivés et curieux quant aux questions environnementales liées à leur quotidien.

Objectifs d’apprentissage :

  1. Les élèves acquerront certaines notions relatives aux déchets marins, dont leurs sources et leurs impacts sur les systèmes aquatiques et sur les organismes qui peuplent nos océans, et ils seront en mesure de les différencier selon leur type.
  2. Les élèves effectueront un transect afin d’estimer la répartition et l’indice d’abondance relative de microparticules.
  3. Les élèves recueilleront, analyseront et présenteront leurs données.

Préparation du terrain pour l’étude des microparticules

En utilisant la présentation PowerPoint « Marine Debris and Micro Particles » (en anglais; voir la section Ressource), ou votre propre documentation, présentez aux élèves le thème des déchets marins avant qu’ils ne réalisent l’activité sur les microparticules. Proposez-leur de faire un remue-méninges pour trouver une définition de « déchets marins ». Cette activité pourrait vous permettre de parler de certains types de déchets marins présents sur le littoral et dans les systèmes aquatiques (verre, métal, caoutchouc, plastique). Abordez aussi la question des différentes sources, marines ou terrestres, génératrice de débris marins. Les sources marines comprennent les navires de pêche, les plates-formes pétrolières et gazières, les bateaux marchands, les bateaux de croisière et autres navires, les boues d’épuration et les activités aquicoles. Quant aux sources terrestres, elles englobent toutes les ordures provenant du continent et résultant d’une mauvaise gestion des déchets, comme les dépotoirs, les déversements illégaux et la protection inadéquate des conteneurs à déchets, ainsi que des phénomènes plus naturels, comme les eaux pluviales, les ouragans, les tsunamis et les inondations.

Abordez les thèmes suivants : les microparticules, les microplastiques, et les sources et impacts de ces derniers sur le milieu marin.

Définissez le rôle du transect et expliquez son importance dans la recherche scientifique. Indiquez aux élèves la procédure qu’ils devront suivre pour mener leur échantillonnage dans le but de recueillir des microparticules le long de la zone supérieure et de la zone intercotidale de la plage. Le transect devra s’étendre de la ligne de débris, laissée par la marée haute, jusqu’à la zone de déferlement.

Préparation de l’enseignant

Matériel

  • Sable de bac à sable
  • 10 tamis
  • 1 corde à linge de 30 pieds
  • 2 affiches laminées (ligne de débris et zone de déferlement)
  • Étiquettes laminées et numérotées de 1 à 10 pour l’identification des quadrats
  • 10 sacs d’un gallon de type Ziploc (un par quadrat)
  • Billes en plastique de différentes dimensions. Choisissez-en de différentes couleurs (bleues, jaunes, orangées, noires, blanches et rouges) et de deux tailles : des grosses pour représenter les macroparticules; des plus petites pour les microparticules. Notez toutefois que ces dernières doivent être plus grosses que les mailles du tamis.
  • 20 assiettes en carton qui serviront de plateaux de triage (10 identifiées « macro » et 10 identifiées « micro »).
  • 50 gobelets de papier
  • Une dizaine d’attaches plastiques pour câbles ou de la cordelette pour attacher les numéros de quadrat à la corde à linge
  • Feuilles d’identification pour les macroparticules et les microparticules
  • Fiches de données
  • 10 seaux de 2 gallons
  • 10 cylindres gradués de 25 ml en verre

(Data sheet, p. 35)

Fiche de données

(Vertical)

Numéro de quadrat

Nombre de macroparticules (> 5 mm)

Nombre de microparticules (< 5 mm)

Densité des microparticules (g/cm3)

Changement du volume des microparticules dans le cylindre gradué (ml)

Poids (g) des microparticules

Densité (g/cm3) x volume (ml) = poids (g)

(Horizontal)

Pellicules

Fragments

Mousses plastiques

Filaments

Cigarettes

Verre

Mise en place par l’enseignant

  1. Placez les étiquettes laminées aux extrémités opposées de la corde à linge de 30 pieds pour indiquer la ligne de débris (à 0 pied) et la zone de déferlement (à 30 pieds). Avec la ficelle ou la corde, attachez les numéros laminés de chaque quadrat à la corde à linge, de la ligne de débris jusqu’à la zone de déferlement. Placez la corde à linge sur le sol afin de représenter le transect.
  2. Inscrivez « Quadrat » sur les 10 sacs de type Ziploc et numérotez-les de 1 à 10. Placez le sable et les billes qui représentent les macroparticules et les microparticules de chaque quadrat dans les 10 sacs. Les sacs indiquent l’échantillon prélevé à un endroit donné le long du transect.
  3. Positionnez les 10 sacs le long du transect, de la ligne de débris à la zone de déferlement.

Activité

  1. Séparez les élèves en équipes de trois. Chaque groupe choisira un numéro de quadrat comme échantillon (de 1 à 10). Remettez le matériel suivant à chaque groupe :
    • Le sac Ziploc qui correspond à son numéro de quadrat
    • 1 tamis
    • 1 seau de 2 gallons
    • 1 cylindre gradué de 25 ml
    • 2 assiettes en carton (une étiquetée « macro > 5 mm », et l’autre étiquetée « micro < 5 mm »)
    • 5 gobelets de papier
    • Une feuille d’identification des macroparticules et microparticules
    • Une fiche de données
    • Du papier essuie-tout

Faites en sorte que vos élèves procèdent de la manière suivante :

  1. Placer le tamis sur le seau de 2 gallons. Verser le sable et les billes du sac Ziploc dans le tamis. Le tamis laisse passer le sable, mais retient les billes. Recueillir les macroparticules et les microparticules du tamis et les déposer dans une assiette de carton.
  2. Séparer l’échantillon de macroparticules (grosses billes) de l’échantillon des microparticules (petites billes). Poser les macroparticules dans une assiette étiquetée « macro », et les microparticules dans une assiette étiquetée « micro ».
  3. Pour chaque type (macro ou micro), séparer les particules (billes) par couleur en utilisant les gobelets. Identifier ensuite le type de particule avec la feuille d’identification des macros et microparticules.
  4. Comptabiliser les macroparticules et les microparticules selon leur type, et inscrire leur quantité sur la fiche de données.
  5. Remplir le cylindre gradué de 25 ml de 10 ml d’eau pour déterminer le poids de chaque type de microparticule en grammes. Placer les billes d’un type de microparticules dans un cylindre gradué de 25 ml et indiquer l’augmentation du volume (ml) sur la fiche de données. Une fois le volume inscrit, placer le tamis sur un seau vide. Verser les billes et l’eau du cylindre gradué dans le tamis. Déposer les billes sur un papier essuie-tout pour les faire sécher, puis répéter la procédure pour chaque type de microparticule.
  6. Une fois que le volume (ml) de chaque type de microparticule a été déterminé, calculer leur poids (g) selon la formule suivante : la densité de chaque type de plastique (g/cm3) x le volume (ml) = le poids (g), et reporter vos résultats, volume et poids, dans la fiche de données.
  7. Entrer les données pour les macroparticules et les microparticules dans un tableau Excel, et créer des graphiques pour votre quadrat. Comparer vos résultats avec ceux d’autres élèves.
  8. Les billes sont réutilisables; les remettre dans les sacs Ziploc après les avoir très bien asséchées.

Discussion-synthèse

À partir des graphiques produits par les élèves, lancez une discussion à propos de leurs découvertes. Amenez-les à identifier la zone où ils ont trouvé la majorité des débris, le type de débris sur lesquels ils sont tombés fréquemment ou, au contraire, ceux qu’ils ont plus rarement relevés. Selon les résultats, quelle corrélation peut-on établir entre le type de débris trouvés et la fréquentation de la plage? En tant qu’enseignant vous devriez d’ailleurs prendre en compte ces différents aspects avant de préparer le contenu des sacs. Vous pourriez, par exemple, procéder de la manière suivante :

  1. Répartir les microparticules le long du transect en tenant compte de leur nombre (placer un plus grand nombre de billes représentant les mousses plastiques dans le quadrat près de la ligne de débris, et des billes désignant les plastiques résistants vers la zone de déferlement).
  2. Choisir les types de plastiques les plus représentatifs d’une île-barrière développée (mousses plastiques, verre, fragments de toutes sortes et mégots de cigarette).

Activité de prolongement

Demandez aux élèves de chercher, à l’aide de Google Earth, deux images satellites d’île-barrière : l’une développée, l’autre non développée. Orientez leur réflexion sur les conséquences de l’activité humaine sur les plages et de l’urbanisation du littoral, et invitez-les à vous fournir des exemples de cette empreinte humaine, à la fois sur une plage aménagée et sur une plage non développée. Proposez-leur d’observer des bassins versants et les paysages avoisinants. Interrogez-les sur ce qu’ils voient (rivières, chenaux de marée) et sur les notions suivantes : l’influence des courants littoraux et des marées sur les plages, la proximité d’une zone densément peuplée ou d’un développement d’origine humaine, et les sources terrestres potentielles de débris marins.

Puis, en tenant compte de la densité d’une microparticule et de son emplacement dans une colonne d’eau de mer, demandez aux élèves quels seraient les types d’organismes susceptibles d’être en contact avec cette microparticule.

En terminant, nous espérons que les enseignants qui réaliseront cette activité nous feront part de leurs commentaires et d’éventuelles adaptations. Cette activité répond aux objectifs et standards de l’État de la Géorgie et aux principes mis de l’avant par Ocean Literacy, mais il serait facile de l’adapter aux normes d’autres États ou provinces.

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Dodie Sanders est formatrice en matière de milieux marins à l’University of Georgia Marine Extension. Katelyn Hunt est stagiaire du programme Georgia Sea Grant Marine Education Internships.

Maria Romero, infographiste, est étudiante de troisième année en traduction professionnelle à l’Université de Sherbrooke, au Québec. Elle compte se spécialiser dans le domaine de la localisation de sites Web et de logiciels de l’anglais vers le français ou l’espagnol.

Ce qui précède est une traduction de « Understanding Micro Particles in the Ocean » qui a été publié en Green Teacher 104, Automne 2014.

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Ressource

Présentation PowerPoint « Marine Debris and Micro Particles » (en anglais seulement) http://marex.uga.edu/education_resources/

Référence

1 http://www.stapgef.org/impacts-of-marine-debris-on-biodiversity-current-status-and-potential-solutions/ (en anglais seulement)

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