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Explorez les mondes parallèles de la biophilie

Par Terril Shorb

Traduction par Karolina Brzezinska

Vous souvenez-vous de la dernière fois que votre cœur s’est enflammé à la vue d’un lever de soleil qui embrasait le ciel sombre tel de la lave en éruption? Ou peut-être de la fois où vous avez eu une montée d’adrénaline après avoir entendu le craquement d’une brindille dans les boisés avoisinants, bruit qui vous a soudain donné envie de prendre la poudre d’escampette? C’est ainsi que se manifestent les échanges entre l’être humain et la nature, des échanges qui sont aussi vieux que l’humanité elle-même. Nous ressentons un besoin inné d’entrer en relation avec les habitats les créatures de la nature et avec les différents processus qui y ont cours. On donne à ce besoin le nom de biophilie. On peut définir la biophilie comme étant l’héritage génétique qui lie l’environnement psychique qui nous habite et l’environnement physique dans lequel nous habitons. Nous sommes munis d’un répertoire de réponses biophiles qui nous permettent de nous adapter aux promesses et aux périls de la nature. Ces réponses se traduisent par exemple par notre pulsion, consciente et subconsciente, à fuir devant certains dangers comme des bêtes sauvages ou des phénomènes météorologiques violents. À l’inverse, d’autres réponses biophiles nous incitent à nous fier à nos yeux, à notre odorat, ou encore à nos papilles gustatives pour trouver des fruits ou des racines pour apaiser notre faim ou de l’eau pour étancher notre soif. Autrement dit, ces réponses sont la manifestation de notre capacité ancestrale à suivre la nature dans son évolution perpétuelle.

Aujourd’hui encore, nos réponses biophiles peuvent contribuer à notre qualité de vie. Cet article le montre sous trois angles différents. Tout d’abord, ces capacités innées à réagir enrichissent et approfondissent notre lien avec la nature et notre sentiment de bien-être général. Ensuite, grâce à de simples gestes quotidiens, ces capacités deviennent de plus en plus présentes, en nous et en ceux avec qui nous travaillons, ce qui contribue à notre sentiment de bien-être. Finalement, le fait d’être en phase avec notre héritage biophile permet de clore la boucle de réciprocité, c’est-à-dire de redonner quelque chose à la nature et de lui témoigner de la gratitude pour tout ce qu’elle nous a offert. Une telle approche pourrait changer la mentalité de notre culture contemporaine, ce qui aurait pour effet d’atténuer les changements négatifs qui menacent le climat de notre planète.

Les sceptiques diront que l’être humain cherche toujours à combler ses propres besoins avant tout, et que le reste, dont la nature, vient plus tard. Dans son livre intitulé Birthright: People and Nature in the Modern World, Stephen R. Kellert, un écologiste social de l’Université Yale qui a contribué plus que quiconque à faire avancer le concept des valeurs biophiles, se penche sur cette question :

Toutes nos valeurs biophiles doivent être exprimées si nous souhaitons être des humains à part entière et jouir d’une bonne santé. Chaque valeur fournit une contribution cruciale au corps humain, à l’esprit et à l’âme, et offre un ensemble d’atouts essentiels. Une fois que toutes nos valeurs feront partie d’un ensemble fonctionnel, équilibré et interactif, nous serons prêts à transformer l’éthique environnementale. Nous prendrons alors soin de la nature, motivés par notre intérêt personnel et non pas pour répondre à des impulsions altruistes quelles qu’elles soient (Kellert).

C’est un point de vue important. En effet, dans notre époque marquée par les politiques environnementales controversées, même si les humains démontrent beaucoup d’altruisme, leur engagement relatif aux valeurs biophiles ne dépend pas que de ce sentiment. Le message essentiel à retenir, lorsqu’il est question de biophilie, est que la survie à long terme de l’humanité dépend avant tout de son adaptation continue à la nature. Heureusement, grâce à des millions d’années d’expérience, nous y sommes très bien préparés.

Activités axées sur les réponses biophiles

Les activités présentées ci-après sont créées pour stimuler une expression franche de nos neuf réponses biophiles innées. Ces activités sont conçues pour les enseignants, les parents, les professionnels de la santé, et toute personne intéressée à contribuer à la santé et au bien-être des personnes de tous âges, dans nos quartiers et nos collectivités, par un contact direct avec la nature avoisinante.

La réponse esthétique

La réponse esthétique nous permet d’évaluer les possibilités qui s’offrent à nous dans la nature. Dans les grandes étendues de la savane, la survie de nos ancêtres reposait entre autres sur leur capacité d’observation rigoureuse et vigilante des divers éléments de leur environnement physique. Cette forme de perception, riche et attentive, nous invite grandement et profondément à assimiler le contenu du paysage ou de la scène que nous voyons : les arbres, l’eau, la présence de prédateurs ou de proies et le relief de la terre elle-même. La réponse esthétique influence nos émotions, et c’est la raison pour laquelle nos ancêtres étaient guidés par un sentiment instinctif qui leur dictait de se diriger ou non vers un endroit en fonction de leur attirance ou de leur aversion émotionnelle. En fait, ce sentiment résulte des évaluations subconscientes des bienfaits ou des dangers potentiels de l’endroit en question. La beauté d’un lever de soleil, le murmure d’un ruisseau et le chant d’un oiseau en forêt font tous appel à notre réponse esthétique et nous invitent à nous engager davantage dans les innombrables sphères de la nature.

Activité : Suivre le mouvement du soleil

Cette activité permet de prendre conscience de l’immensité de la nature, même au beau milieu d’un environnement urbain. Il suffit d’avoir accès à une fenêtre qui donne une vue dégagée de l’horizon, à l’est ou bien à l’ouest. Ce dernier ne doit pas obligatoirement être terrestre; un horizon construit par l’homme, comme le toit d’un bâtiment avoisinant, peut tout aussi bien convenir. Choisissez un point fixe, observable à partir d’une fenêtre de votre maison où vous pourrez vous tenir debout dans la même position tous les jours et qui donne à l’est (pour voir le lever du soleil) ou à l’ouest (pour voir le coucher de soleil). Lorsque le soleil se lève ou se couche, collez sur votre fenêtre un petit morceau de ruban, sur lequel vous aurez préalablement écrit la date, à l’endroit exact où le soleil apparaît au-dessus (ou disparaît en-dessous) de la ligne d’horizon qui se trouve dans votre champ de vision. Pendant trois ou quatre semaines, répétez cet exercice deux ou trois fois par semaine. Observez la façon dont, selon la saison, le soleil semble se déplacer vers le nord ou vers le sud. Il s’agit d’un bon exercice pour nous rappeler qu’il est possible, comme cela était le cas pour nos ancêtres, pour nous-mêmes, à l’époque moderne, de rester attentifs aux changements de la terre par rapport à notre étoile et que ceux-ci correspondent à la succession des saisons.

La réponse négativiste

Dans le même ordre d’idées, lorsque nous sommes témoins de formes de vie ou de phénomènes naturels que nous percevons comme des dangers potentiels, nous restons vigilants. Les serpents, les éclairs, les nuages d’insectes volant autour de notre tête, les requins dans les océans ou les rafales de vent, pour ne mentionner que ceux-là, sont des éléments qui déclenchent une gamme d’émotions fortes ou déplaisantes : c’est ce que nous appelons la réponse négativiste. Le fait d’expérimenter ce type de réponse amène l’humain à prendre des moyens concrets pour assurer sa survie, comme éviter le danger ou chercher un refuge. Aujourd’hui, cette réponse est parfois manipulée, ce qui a pour effet de produire une réponse négativiste inadaptée. Par exemple, lorsqu’une personne voit trop de publicité sur des maisons envahies par les insectes, elle répond d’une façon inadaptée en pulvérisant sa maison de poison qui pourrait causer des problèmes de santé aux occupants.

Activité : Hiérarchiser les dangers

Plusieurs de mes collègues ont peur des araignées et autres bibittes susceptibles de les blesser ou pire encore. La réponse négativiste a pour but de nous aider à identifier les dangers réels présents dans la nature et à prendre des précautions si elles sont nécessaires. Un bon moyen d’aider ces gens à mettre en perspective les divers dangers est de leur montrer des statistiques récentes qui présentent les principales causes de décès prématuré chez les humains. Le National Safety Council fournit un tableau simple qui rend compte des principales causes de décès prématurés aux États-Unis. Vous pouvez trouver ces renseignements sur le site suivant : <www.nsc.org/NSC%20Picture%20 Library/News/web_graphics/Injury_Facts_37.pdf> (Note de l’éditeur : Une liste qui présente les dix principales causes de décès au Canada se trouve sur le site suivant: www.statcan.gc.ca/tables-tableaux/sum-som/l01/ cst01/hlth36a-eng.htm). Ce tableau démontre entre autres que les probabilités de mourir d’une maladie cardiaque (le risque est de 1/6) sont beaucoup plus élevées que celles de succomber à une piqûre d’abeille (le risque est de 1/79 000). Les lecteurs trouveront des statistiques sur le site Internet d’organismes de promotion de la sécurité de leur province ou de leur État respectif. Cette activité permet aux gens d’exprimer et d’avouer leurs peurs, ainsi que de leur fournir des faits afin de les aider à considérer les contacts avec les phénomènes de la nature d’une manière réaliste. En somme, manger trop de hamburgers s’avère beaucoup plus dangereux que de passer à côté d’une abeille.

La réponse humaniste

La troisième réponse biophile est la réponse humaniste, qui se manifeste par un le sentiment d’être en phase avec les créatures sauvages, voire des végétaux ou certains paysages. Les humains ont évolué avec ce type de réponse et sa fonction adaptative, qui produit des émotions positives éprouvées grâce au sentiment de communion et à la camaraderie. De plus, la réponse humaniste encourage notre aptitude à créer des liens avec les animaux, mais par-dessus tout, elle favorise la coopération, le partage et la relation avec d’autres êtres humains autour d’une amitié commune avec d’autres espèces.

Activité : Découvrir qui habite ici

Trouvez un endroit où vous pouvez vous asseoir ou vous tenir debout pendant quelques minutes sans faire de bruit afin d’écouter et d’observer (suscitez les autres sens s’il y a lieu). Plus vous resterez longtemps immobile et silencieux dans un même endroit, plus le nombre de petites bêtes sauvages que vous observerez sera grand. Ensuite, orientez votre regard vers le sol, et cherchez les terriers, les pistes, les plumes, les excréments, les toiles et autres preuves de la présence de vie à plus petite échelle. Peu à peu, relevez le regard au niveau des végétaux qui poussent au ras du sol, et ensuite jusqu’au niveau des arbustes, des arbres et, finalement, jusqu’au ciel. Quels animaux s’agitent à chacun de ces niveaux? Pendant combien de temps restent-t-ils au même endroit? Qu’est-ce qu’ils y font? Il est possible de faire cet exercice dans le sens contraire, c’est-à-dire de scruter d’abord le ciel et de déplacer votre regard vers le bas jusqu’au sol. Voici une petite comptine pour vous souvenir de cette activité:

De la terre jusqu’au ciel,

Ou des nuages jusqu’à la terre,

Quelles créatures sauvages

Peut-on apercevoir?

La réponse naturaliste

Les trois réponses suivantes font essentiellement appel à nos habiletés cognitives. La réponse naturaliste est primordiale pour assurer notre bon développement intellectuel, émotionnel et physique. Grâce à notre immersion continue dans l’environnement physique, nous entrons en contact direct avec les éléments naturels et autres entités qui influencent notre orientation corporelle, nos mouvements, nos sens et nos préférences sensorielles. La réponse naturaliste s’exprime avant tout par la satisfaction et la motivation que nous tirons de notre présence dans la nature. Elle fournit aussi un nombre considérable de bénéfices corollaires : l’amélioration de notre santé physique, l’augmentation de notre confiance et de notre estime de soi, ainsi que l’accroissement de notre curiosité, de notre imagination et de notre envie de découvertes.

Activité : Être en contact

Les végétaux et les animaux sont en perpétuelle relation avec l’eau, la terre et les aliments que la nature leur procure. Nos ancêtres observaient rigoureusement quelles graines ou quels fruits les animaux trouvaient à manger et tentaient eux aussi de les manger. Vous pouvez essayer de manger certains péricarpes en fleur ou d’autres aliments présents dans le vaste garde-manger de la nature en cultivant, dans votre jardin, certaines de ces plantes comestibles. Vous remarquerez également que les oiseaux se livrent continuellement à la recherche de nourriture. Le site Internet du laboratoire d’ornithologie de l’Université Cornell (www.birds.cornell.edu/celebration/gardening/gardening-for-the-birds) offre de l’information pertinente pour en apprendre davantage sur les interactions qui existent entre les oiseaux chanteurs et les végétaux. Il propose aussi des conseils pour vous aider à créer votre propre jardin miniature pour oiseaux afin que vous puissiez suivre de près les manifestations réelles des liens existant entre les animaux et la nature, et ce, directement de votre balcon ou de votre cour.

La réponse scientifique

Il est facile de concevoir qu’une relation directe avec la nature, telle qu’elle s’exprime dans la réponse naturaliste, peut mener à la réponse scientifique. La signification adaptative de cette réponse réside dans le fait que son développement a doté nos ancêtres d’une capacité cognitive à porter attention aux détails. Les premiers humains devaient être capables d’observer rapidement les détails des habitats et de comprendre comment ceux-ci étaient organisés. Cette réponse permet aux êtres de notre espèce d’augmenter leur capacité consciente à classer, à étudier et à dominer, et à savoir à quel moment il est bon de consommer ou encore d’emmagasiner les richesses abondantes, et unies par des liens complexes, que nous offre la nature et auxquelles nous devons notre existence.

Activité : Observer les constantes présentes dans la nature

Plus notre communion sera profonde, et plus notre soif d’exploration de la nature sera grande, plus il sera facile de remarquer les constantes dans la façon dont les plantes poussent. Les cycles naturels et les saisons exercent une importante influence sur la manière de vivre des animaux. Voici une activité toute simple qui vous permettra d’observer certains de ces processus. Procurez-vous un calendrier que vous pouvez accrocher au mur, et tenez-le toujours à portée de main pour noter les différentes phases de croissance d’une plante à fleurs qui pousse chez vous ou à proximité. Sur le calendrier, faites une marque à la date à laquelle vous aurez remarqué, pour la première fois, la présence de bourgeons qui gonflent aux extrémités des petites branches. Tenez un registre des changements de la plante : la présence de bourgeons, le déploiement des feuilles, la floraison, l’apparition des fruits, et ce, jusqu’au jour où le fruit semblera mûr. Nos ancêtres devaient voyager loin, en dépensant beaucoup d’énergie et en sacrifiant leur sécurité afin de se procurer les denrées essentielles à leur survie. Ils devaient observer le moment de floraison d’une plante comestible en particulier et devaient savoir quand elle produirait enfin ses fruits. De cette manière, ils savaient précisément quand retourner faire la cueillette dans les secteurs où ces plantes poussaient.

La réponse symbolique

Une fois que nos ancêtres avaient pris conscience de la topographie des environs et qu’ils connaissaient les processus et les échéanciers de la nature, il était primordial pour eux de pouvoir partager leurs connaissances avec leurs prochains, ce qui nous amène à la troisième réponse biophile de la sphère cognitive : la réponse symbolique. L’importance adaptative de cette réponse découle de notre capacité de communication par nos repères, nos récits ainsi que l’invention de nouvelles techniques symboliques qui sont toutes dérivées de la nature, mais aussi inspirées et exigées par elle. Notre aptitude à utiliser des symboles est l’un des éléments qui nous définit en tant qu’êtres humains. Kellert dit de l’expression symbolique de la biophilie qu’elle “nous imprègne de la nature et la transforme en quelque chose de totalement différent. Le symbolisme et le mythe de la nature prennent leur source dans l’esprit et le processus de réflexion humains.”

Activité : Faire une carte aux trésors de la vie

Imaginez nos ancêtres en train de pratiquer la cueillette et la chasse dans la savane. En cours de route, ils en ont beaucoup appris sur les plantes, ainsi que sur les animaux et leur manière de bouger, de trouver de l’eau et de grandir. Il était important pour eux de se rappeler ces détails afin de savoir quand et où trouver des aliments pour se nourrir, de l’eau à boire et des matériaux pour fabriquer des outils. Ils ont dû mémoriser tous ces éléments vitaux, peut-être les ont-ils répétés dans des psalmodies ou des chansons, afin de retenir l’essentiel. Pendant que vous assimilez certains éléments proposés dans nos activités, réfléchissez à la manière dont vous pourriez représenter cette information utile à l’aide de symboles durables. Afin de stimuler votre mémoire, vous pouvez par exemple écrire un poème que vous réciterez par la suite pour vous aider à retenir quand la fleur porte son fruit, ou quand le soleil atteint son point le plus éloigné à l’horizon nord. Vous pouvez également dessiner une carte aux trésors de la vie locale, et inscrire des X aux endroits où il se passe quelque chose d’important dans la nature. En somme, créez une façon de symboliser les connaissances que vous avez acquises au sujet des visages multiples et mystiques de la nature.

Les trois réponses biophiles précédentes servent à tisser des liens entre nos sentiments et nos pensées au sujet de nos interactions avec la nature dans un ensemble intégrateur, qui reflète nos croyances et notre lien d’appartenance avec elle.

La réponse utilitariste

La réponse utilitariste découle de notre volonté de satisfaire nos besoins et nos désirs. Il y a une tendance humaine à tirer plaisir et confort de l’exploitation des ressources naturelles. Nos ancêtres ont développé des moyens pour s’adapter aux saisons, aux cycles et aux diverses forces de la nature afin de renforcer leur sentiment de sécurité. Pour ce faire, ils devaient utiliser et manipuler les produits et matériaux issus de la nature pour se nourrir et se protéger, mais aussi pour tous les autres aspects liés à la survie. Tout aussi moderne que nous la croyions, notre espèce se fie encore et toujours à Dame Nature pour obtenir les vivres quotidiens nécessaires à sa subsistance. Après tout, qui n’aime pas voir son garde-manger bien rempli?

Activité : Comprendre d’où vient notre eau

Les trois quarts de la surface de la Terre sont recouverts d’eau; pourtant, il nous est impossible de la boire. Alors, d’où provient notre eau potable? Pendant leurs voyages dans les régions arides et poussiéreuses, nos ancêtres devaient trouver des sources d’eau. Ce n’est pas tout : ils devaient aussi savoir quand ces trous d’eau allaient être assez remplis pour étancher leur soif. Et vous? D’où provient l’eau que vous buvez? En allant sur le site Internet de votre fournisseur d’eau, essayez de savoir comment l’eau parvient jusqu’à votre robinet et découvrez où, dans le bassin versant, l’eau est prélevée pour ensuite être distribuée jusqu’à chez vous. Un site Web intéressant créé par le U.S. Geological Survey traite de la science de l’eau et récapitule les chemins qu’entreprend l’élément naturel le plus primordial à notre vie. Comment l’eau voyage-t-elle dans les airs et la terre avant d’être finalement prête à être versée dans notre verre (http://ga.water.usgs.gov/edu/watercycleplacemat.html)?

La réponse axée sur la domination de la nature

Aujourd’hui, il est possible de remplir le garde-manger en allant tout simplement au supermarché et en mettant plein d’aliments dans son chariot. Toutefois, pour nos ancêtres, la solution n’était pas aussi simple. C’est une combinaison de maîtrise, de compétence, de savoir-faire et de collaboration qui représentait le chariot de supermarché et qui représentait une réponse axée sur la domination de la nature. Afin de survivre dans la savane, nos ancêtres devaient parfaitement maîtriser leurs forces et leurs savoirs pour pouvoir rivaliser avec les autres dans le but de se procurer des ressources, mais aussi pour pouvoir surmonter les difficultés susceptibles de surgir à tout moment. Selon Kellert, de telles expériences forgent les qualités des êtres humains comme « l’ingéniosité, la persévérance, la force et la bravoure, dont découlent la confiance, la fierté et l’estime de soi. Dans ce rapport à la nature, nous cherchons la chance d’être mis à l’épreuve, de démontrer notre endurance physique, de prouver notre force mentale ». Autrement dit, nous pourrions penser qu’il s’agit là de l’étalon originel selon lequel tous doivent montrer leurs compétences.

Activité : Apprendre du savoir-faire des animaux

Nos ancêtres possédaient un arsenal de savoirs acquis à force d’être toujours en contact avec la nature. Ce savoir-faire leur a permis de subvenir à leurs besoins tout en garantissant leur sécurité, et ce, d’une manière relativement harmonieuse avec le monde vivant qui assurait leur subsistance. Quel savoir pouvons-nous tirer grâce aux végétaux et aux animaux sauvages qui vivent parmi nous? Voici une autre activité axée sur le développement du sens de l’observation. Essayez de suivre, pendant une journée complète, une espèce locale d’oiseaux de votre choix. Où trouvent-ils de la nourriture et de l’eau? À quel endroit se perchent-ils lors des périodes fraîches ou chaudes de la journée, ou, tout simplement, où passent-ils leurs temps? Quelle partie de l’arbre préfèrent-ils : la cime, le milieu de l’arbre ou le sol en dessous? Comment réagissent-ils aux cris d’alarme émis par d’autres oiseaux? Où se cachent-ils pour se protéger? Tous les jours, prenez des notes au fur et à mesure que vous en découvrez un peu plus sur le comportement de ces oiseaux. Finalement, quelles leçons pouvez-vous tirer des allées et venues de vos petits voisins à plumes? Dans le cas où vous voudriez tirer encore plus profit de la nature, dans quelle mesure ce que font les oiseaux pourrait-il vous aider à subvenir à vos besoins?

La réponse moraliste

Finalement, la réponse moraliste est l’approche selon laquelle nos ancêtres ont développé un sentiment d’interdépendance et d’appartenance qui, selon Kellert “découle de ce sentiment de parenté élémentaire qui lie les unes aux autres toutes les formes de vie”. La réponse moraliste se manifeste entre autres par la faculté qu’a notre espèce de voir la nature comme une structure unificatrice, mais aussi comme une source de spiritualité. Cette réponse, d’origine biologique, génère des sentiments de responsabilité subtils et profonds, issus de nos divers codes éthiques, et qui encouragent la protection et le respect de la nature et de ses processus, tels que la diversité des membres d’espèces non humaines, des habitats naturels et même du cosmos auquel appartient la Terre. Il en résulte un sentiment intrinsèque d’harmonie, d’ordre et d’affiliation qui offre un avantage adaptatif, car la réponse moraliste oriente les humains vers une ligne de conduite favorable à la survie à long terme de notre espèce.

Activité : Restaurer une parcelle de terre

Le fait de retourner à des endroits où ils avaient préalablement trouvé de la nourriture et de l’eau était crucial pour la survie de nos ancêtres. Ils prenaient probablement part à des prières et à des cérémonies d’action de grâce afin de remercier la nature pour tout ce qu’elle leur fournissait pour assouvir leurs besoins quotidiens. Ainsi, ils se rendaient compte que quand la nature va, tout va! Aujourd’hui la plupart des produits que nous récoltons pour combler nos besoins viennent du supermarché, mais la nature est encore à l’origine de ces légumes et de ces hamburgers. Alors, comment montrer notre gratitude et remercier la nature pour tout ce qu’elle fait pour nous? Choisissez, par exemple, une petite parcelle stérile de votre terrain, le long de la rue ou dans un terrain vague, et avec vos amis et votre famille, donnez-y un second souffle pour qu’elle puisse redevenir fertile. Avec l’aide de votre entourage, aménagez un jardin miniature avec des fleurs parfumées qui vous réchaufferont le cœur, mais qui, avant tout, attireront les pollinisateurs afin qu’ils se nourrissent de pollen et permettent ainsi aux plantes comestibles et à fruits de faire ce qu’elles ont à faire. La société Xerces propose d’excellentes astuces pour vous aider à créer votre parcelle de pollinisation. Pour plus d’information, consultez le site Web suivant : www. xerces.org/pollinator-resource-center/ . En redonnant vie à une parcelle de terrain, vous saluerez par la même occasion la nature qui assure votre subsistance, et prendrez à nouveau conscience de la capacité qui réside profondément en vous à vivre en étroite harmonie avec la nature vivante, à laquelle vous appartenez.

Merci de m’avoir accompagné dans ce périple, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur, dans le but d’explorer les mondes parallèles qui sont au centre de l’apprentissage biophile. J’espère que vous aimerez partager avec d’autres cette aptitude ancestrale, car il s’agit d’une merveilleuse façon de transmettre ce cadeau issu de notre patrimoine et de notre héritage biophile.

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Terril Shorb enseigne depuis nombre d’années au Adult Degree Program de Prescott College, où il a créé le programme Sustainable Community Development. Il y donne également le cours en ligne Children and Nature. Avec sa femme, il est le cofondateur de la maison d’édition à but non lucratif Native West Press (www.nativewestpress.org). Il a également participé à la création du « Kellert-Shorb Biophilic Values Indicator », un outil pédagogique utilisé en matière de conservation de la nature. Terril Shorb vit dans la région montagneuse située dans le centre de l’État de l’Arizona, où il cohabite avec de nombreuses espèces vivantes, comme des pécaris et des tarentules.

Karolina Brzezinska est étudiante au baccalauréat en traduction professionnelle à l’Université de Sherbrooke. Passionnée de langues et de cultures, elle est aussi titulaire d’un certificat en langues modernes de l’Université de Sherbrooke.

Ce qui précède est une traduction de « Exploring the Twin Landscapes of Biophilic Learning » qui a été publié en Green Teacher 96, Été 2012.

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