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La traque des espèces envahissantes : un enjeu mondial, un défi instructif

Par April Claus, Susie Moffett et Stacey Widenhofer 

Traduction par Aude Charrin

Les conséquences de la propagation des espèces envahissantes peuvent être difficiles à cerner pour les élèves. Leur compréhension de la question va d’un extrême à l’autre : certains les considèrent comme de simples mauvaises herbes, tandis que d’autres les redoutent au point de les comparer à de dangereux envahisseurs venus semer le chaos dans notre paysage. Ils peuvent également penser que ces espèces sont seulement nuisibles ailleurs, loin de chez eux. Les enseignants doivent donc remettre la gravité de cette menace en perspective, et proposer à leurs élèves de la contrer grâce à des actions positives à leur portée. L’activité extérieure dont il est question dans le présent article est conçue pour développer leurs aptitudes au travail en équipe et les sensibiliser aux dangers que représentent les espèces envahissantes pour la santé des personnes, ainsi que pour la stabilité économique et biologique des écosystèmes concernés. Cet atelier incite aussi les élèves à s’interroger sur la façon dont les espèces nuisibles sont véhiculées par les activités humaines, ainsi que sur l’attitude à adopter pour lutter contre la propagation de ces organismes destructeurs.

Dans l’activité La traque des espèces envahissantes, les élèves doivent “débarrasser” leur environnement de celles-ci. Pour ce faire, ils doivent collecter des balles de couleur sur un terrain délimité et les placer dans les bacs appropriés le plus rapidement possible. Travaillant en équipe, ils sont également tenus de suivre une série de règles concernant la manipulation des balles et sont amenés à prendre des décisions de groupe quant à la sélection des outils à utiliser et à l’élaboration d’une stratégie efficace. Vous pouvez leur accorder plusieurs essais pour les encourager à perfectionner leur méthode et motiver chez eux le désir de s’améliorer. À la fin de l’activité, les élèves devraient, d’une part, avoir une meilleure compréhension de ce que sont les espèces qui menacent leur propre écosystème et, d’autre part, ressentir un réel sentiment de satisfaction engendré par la réussite de leur “combat” contre les espèces envahissantes du jeu.

Classes visées : de la 6e à la 12e année

Temps alloué : de 45 à 60 minutes

Matériel :

  • Un chronomètre;
  • 4 bacs en plastique de couleurs différentes;
  • des balles d’au moins cinq couleurs différentes et d’environ 3 pouces de diamètre;
  • 2 petits seaux blancs en plastique d’un gallon et munis de poignées;
  • 3 cônes en plastique;
  • 2 ramasse-déchets (pinces);
  • 3 bouts de corde d’un demi-pouce d’épaisseur et d’une longueur approximative de quatre pieds;
  • les règles du jeu sous la forme d’une liste à lire aux élèves.

Préparation :

  • Choisissez une surface de gazon plate et bien drainée. Un terrain d’approximativement 40 pieds de largeur sur 40 pieds de longueur devrait convenir parfaitement.
  • Installez un bac en plastique d’environ 18 gallons à chaque coin du terrain (un rouge, un vert, un bleu et un orange). Chaque bac représente un pays, dont le nom et le drapeau figurent sur une de ses faces, laquelle doit être orientée en direction des joueurs.
  • Dispersez les balles de couleurs sur le terrain. Faites en sorte de les éparpiller de façon aléatoire à l’intérieur de l’aire de jeu.

Déroulement :

  1. Les élèves sont divisés en groupes (de 6 à 15 participants par équipe). Dans le cas d’un nombre plus élevé d’élèves, cette activité peut aussi constituer l’un des ateliers liés à une thématique particulière. Il est alors possible de faire participer les équipes les unes après les autres, ou même, de les opposer les unes aux autres, en prenant soin de multiplier par deux le matériel nécessaire. Dans l’éventualité où les équipes joueraient les unes après les autres, veillez à ce que les élèves ne voient ni les accessoires ni le terrain de jeu au préalable pour que chaque équipe dispose, par souci d’équité, du même temps de planification. L’équipe la plus rapide remporte la partie.
  2. Sous la supervision de l’enseignant, les élèves devront choisir une espèce envahissante, mais aussi en nommer d’autres qui représentent également une menace sur leur territoire. (Prévoyez-leur demander de faire cette sélection avant d’arriver sur le terrain pour éviter toute distraction.) Selon la définition de la United States Environmental Protection Agency, une espèce envahissante est une plante ou un animal qui n’est pas endémique à un écosystème, et dont l’introduction entraîne souvent des conséquences économiques, sanitaires ou environnementales graves pour l’écosystème concerné. Les élèves nomment généralement les espèces envahissantes qu’ils ont vues à la télévision, ce qui constitue un bon point de départ. Cependant, nous essayons autant que possible d’orienter leurs choix vers des organismes vivant dans notre environnement pour les sensibiliser à l’aspect local du problème et vaincre l’impression du “ça n’arrive que chez les autres”.
  3. Sélectionnez quatre espèces envahissantes, répandues dans votre région, que vous pourrez apprendre à connaître. Les élèves s’intéresseront au pays d’origine de chaque espèce, à son moyen de propagation et aux problèmes posés dans l’écosystème concerné. Voici des exemples d’espèces répandues en Pennsylvanie occidentale, notre région : la renouée du Japon, la moule zébrée, l’agrile du frêne et le champignon décimant le châtaignier d’Amérique. Lorsque cela est possible, montrez aux élèves un échantillon de l’espèce envahissante pour leur permettre, dans un premier temps, de l’identifier et d’éventuellement la reconnaitre, mais également pour qu’ils commencent à concevoir l’ampleur du phénomène dans leur environnement.
  4. Après leur avoir présenté les différentes espèces, emmenez les élèves sur le terrain de jeu. Les quatre espèces envahissantes sont chacune représentées par une couleur (rouge, bleu, vert et orange). Les espèces endémiques, elles, sont représentées par des balles d’autres couleurs. Mettez les élèves en situation : ils joueront le rôle de scientifiques ayant pour mission de renvoyer, le plus rapidement possible, chaque espèce envahissante à son habitat d’origine (les bacs en plastique correspondants), et ce, en n’utilisant que les outils mis à leur disposition.
  5. Disposez les outils suivants sur le sol : 2 petits seaux blancs en plastique munis de poignées, 3 cônes, 2 ramasse-déchets et 3 bouts de corde de quatre pieds. Un certain temps est alloué pour que les joueurs examinent les outils et élaborent une stratégie avant que le chronomètre ne démarre. Nous laissons habituellement de 5 à 7 minutes de planification aux équipes. La partie ne débute qu’une fois que chaque équipe a pris connaissance des règles et décidé de sa stratégie.
  6. Avant de démarrer le chronomètre, énoncez les règles suivantes à l’attention des participants :
  • Les joueurs ne doivent en aucun cas toucher les espèces envahissantes (les balles rouges, bleues, orange et vertes) ni les bacs en plastique avec une partie de leur corps (pas de contact avec la peau).
  • À aucun moment, les joueurs ne doivent toucher ni déplacer les espèces endémiques (les balles d’autres couleurs), sous peine d’être pénalisés.
  • Les joueurs sont par contre autorisés à toucher les bouts de corde, les ramasse-déchets, les seaux et les cônes.
  • Les joueurs ne peuvent pas enlever leurs habits, leurs chaussures ou leur casquette et s’en servir comme outil.
  • Les joueurs doivent déterminer en équipe les outils à utiliser et ceux à proscrire.
  • Chaque joueur doit, d’une manière ou d’une autre, prêter main forte à son équipe (les encouragements ne sont pas considérés comme une participation).
  • Les joueurs ne doivent pas se pincer les uns les autres avec les ramasse-déchets.
  • Les équipes seront pénalisées en cas d’infractions (par exemple, si un joueur touche ou déplace une espèce endémique, place une balle dans le mauvais bac, ou en prend une avec les mains).

Précisions : Une clarification peut être apportée au moment d’énoncer les règles. En effet, nous autorisons les élèves à utiliser leurs vêtements et leurs chaussures pour déplacer les balles. Ils ne peuvent cependant pas les enlever et s’en servir comme instrument pour manipuler les balles. Par exemple, les élèves peuvent mettre la main dans la manche de leur veste et toucher les balles avec la veste, mais ils ne doivent pas enlever leur veste pour l’utiliser comme un outil à part entière. De plus, les élèves peuvent taper dans les balles avec les pieds pour les rassembler à un certain endroit, mais ils n’ont pas le droit d’enlever leurs chaussures et de s’en servir pour les ramasser.

  1. Lorsque les équipes sont prêtes, demandez aux joueurs de s’aligner le long du terrain de jeu. Donnez le départ verbalement et démarrez le chronomètre. La partie prend fin une fois que toutes les espèces ont été rapatriées dans leur pays respectif.
  2. Amorces à la discussion — Après le premier essai, proposez aux élèves de réfléchir aux notions suivantes :
  • La contamination: Demandez-leur s’ils ont propagé par mégarde leur espèce envahissante dans d’autres pays. Autrement dit, faites-leur prendre conscience du nombre d’élèves qui sont passés par plus d’un pays ou qui ont touché à plus d’une espèce envahissante lors de la partie. Interrogez-les sur les possibles conséquences de cette observation. Pour les aider, invitez-les, pour leur deuxième essai, à assigner certaines couleurs à certains joueurs en particulier afin d’éviter la propagation d’une espèce envahissante dans d’autres pays.
  • La répartition égale des couleurs : Demandez aux élèves de porter attention au nombre de balles et à leur distribution. Lorsque nous menons cette activité, nous faisons en sorte de répartir les balles de façon inégale (nous utilisons généralement 25 balles bleues, 20 balles vertes, 5 balles orange et 5 balles rouges). Les élèves ne font généralement pas attention à cette inéquation au départ, et peuvent alors repenser leur approche du problème lors d’une nouvelle tentative. Il est possible que vous deviez les aider à prendre conscience qu’ils n’ont pas besoin d’être aussi nombreux pour ramasser cinq balles et qu’ils peuvent ainsi utiliser leurs ressources d’une autre manière en reconsidérant les tâches de chacun.
  • Soyez créatifs: Pour augmenter la difficulté, nous utilisons des bouts de clôture grillagée en plastique orange (du type clôture à neige), que nous appelons champignons, en lieu et place des balles orange. Ce nouveau défi force les élèves à choisir les outils les plus appropriés durant l’élaboration de leur stratégie. Les ramasse-déchets se révèlent alors d’une redoutable efficacité!
  1. Infligez des pénalités en ajoutant du temps additionnel au meilleur pointage obtenu. Nous laissons habituellement chaque équipe essayer au moins trois fois (ou plus si le temps le permet). Les élèves vous supplieront sans doute de retenter leur chance. Dans le cas où plusieurs équipes participent à l’activité, demandez-leur de se trouver un nom d’équipe : les élèves sont toujours intéressés de savoir quelle équipe a réalisé le meilleur temps.
  2. Cette activité a été conçue en fonction des outils que nous avions à notre disposition. Faites preuve de créativité en introduisant de nouveaux accessoires ou de nouvelles règles qui répondent le mieux à vos besoins.
  3. Bonne chance, et surtout, amusez-vous!

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Depuis 2005, April Claus est directrice en formation à l’environnement au Fern Hollow Nature Center. Elle travaille également comme naturaliste pour le Sewickley Heights Borough Park à Sewickley, en Pennsylvanie. Passionnée d’herpétologie, elle sillonne les camps scouts et les écoles de la région pour présenter au public certains animaux méconnus.

Après avoir mené des recherches dans le domaine de la génétique pendant de nombreuses années, Susie Moffet consacre désormais son temps à initier les enfants aux merveilles de la science dans la nature, et travaille au Fern Hollow Nature Center depuis maintenant cinq ans.

Comme ses deux consœurs, Stacey Widenhofer enseigne, elle aussi, l’environnement au Fern Hollow Nature Center depuis sept ans. Elle affectionne par-dessus tout faire découvrir les petits trésors de la nature, et en particulier les oiseaux, aux élèves du préscolaire et du primaire.

Aude Charrin est étudiante en traduction à l’Université de Sherbrooke.

Réimpression de l’article « Teaching about Invasive Species », Green Teacher, octobre 2014, ISBN 978-0-9937753-3-8, 80 p. [Consultez la deuxième de couverture de ce numéro pour plus de détails]

Ce qui précède est une traduction de « Around the World Invasive Species Challenge » qui a été publié en Green Teacher 104, Automne 2014.

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