Skip to content

Un monde meilleur grâce au commerce équitable

Par Zack Gross

Traduction par Catherine Gill

Il semble illogique que les producteurs de plusieurs produits de base très importants fassent partie des gens les plus pauvres au monde, vivant dans les pays les moins bien classés selon l’indice de développement humain des Nations unies. C’est d’ailleurs le cas des agriculteurs et des travailleurs qui produisent la plupart de nos vêtements, ainsi que plusieurs autres aliments que nous consommons : café, thé, chocolat, sucre, fruits et autres cultures tropicales.

Le commerce équitable est le système qui combat cette iniquité en offrant aux producteurs la possibilité de recevoir de meilleurs salaires et conditions de travail et d’apprendre des pratiques davantage axées sur l’environnement. Ce type de commerce leur offre également une plus grande influence sur le marché international et des primes sur les prix qui permettraient le développement des collectivités où ils vivent.

Lors des voyages effectués au cours de ma longue carrière, j’ai constaté que les habitants de collectivités dans les pays les plus démunis (tout particulièrement dans plusieurs nations tropicales de ce qu’on appelle les pays du Sud) parviennent à améliorer leur qualité de vie si on leur en offre la possibilité et si on les traite équitablement. Le commerce équitable peut représenter un avantage pour un producteur démuni, encore plus que tout don conventionnel aux œuvres de bienfaisance ne le fait actuellement. Bien que votre générosité à l’endroit de ces œuvres soit appréciée, et tout de même bénéfique, il faut agir davantage du côté des politiques afin de s’assurer que nous consommons des produits de qualité supérieure et que les producteurs ont une meilleure qualité de vie. Par exemple, en Tanzanie, en Afrique de l’Est, j’ai vu des gens qui se déplaçaient d’abord à pied devenir propriétaires d’une bicyclette, puis d’une voiture, et d’autres qui n’avaient aucune technologie des communications avoir accès à Internet et à un téléphone en tout temps; ces changements sont en partie des avantages du commerce équitable pour le marché des produits de l’artisanat. En Amérique centrale et en Amérique du Sud, j’ai été témoin de la même situation pour les marchés du café, du cacao et du sucre.

Chaque consommateur peut soutenir les mouvements internationaux encourageant le commerce équitable en « votant avec son argent » pour des produits éthiques au moment de l’achat. Il est aussi possible d’étudier attentivement les réglementations sur le commerce que des sociétés et des gouvernements riches encouragent et appuient, et qui nuisent à l’économie et aux familles de pays plus pauvres; vous pourrez agir par la suite. Les enseignants peuvent offrir à leurs élèves possédant déjà une conscience citoyenne ces renseignements, ainsi que la structure nécessaire pour poser des gestes qui changeront grandement la vie de producteurs démunis grâce au commerce équitable. Ces gestes peuvent être de former un club, d’organiser un événement ou encore d’intégrer le commerce équitable aux politiques de l’école.

Certains enseignants considèrent le commerce équitable comme un enjeu mondial parmi tant d’autres qu’ils veulent présenter à leurs élèves. D’autres en font la préoccupation et la pratique les plus importantes de l’école, ce qui détermine la façon dont leur établissement contribue à la réduction de la pauvreté à l’échelle mondiale.

J’ai initié mes élèves au commerce équitable pour la toute première fois il y a 45 ans. J’étais alors un militant d’âge universitaire qui se promenait de classe en classe pour parler de la pauvreté dans le monde, faire des jeux de simulation et présenter des diaporamas au moyen de vieilles technologies. Aujourd’hui, je reçois quotidiennement des invitations de la part d’écoles pour y faire des présentations sur le commerce équitable et pour établir des stratégies afin qu’elles obtiennent le statut d’école équitable, qu’elles organisent des conférences et des cérémonies de remise des diplômes promouvant le commerce équitable et qu’elles insistent pour que les divisions scolaires l’intègrent à leurs politiques de durabilité. Dans le présent article, j’expose les principales notions du commerce équitable et propose quelques activités que les enseignants peuvent effectuer en classe.

Mais qu’est-ce que le commerce équitable?

Voici deux questions qu’on me pose souvent : « Qu’est-ce que le commerce équitable? » et « Comment notre école peut-elle obtenir le statut d’école équitable? ». Les gens veulent ensuite savoir où ils peuvent acheter des produits équitables; ils soulèvent des questions sur l’accessibilité des produits et leur prix. Finalement, il arrive qu’on me demande « Le commerce équitable permet-il réellement de changer la situation dans les collectivités des pays du Sud? ». Examinons ces questions plus en profondeur.

            Il faut savoir que le commerce équitable englobe quelques principes de base. Premièrement, le système du commerce équitable permet de s’assurer que les producteurs agricoles et manufacturiers obtiennent un meilleur revenu pour leur travail et leurs produits que ce qu’ils perçoivent sur le marché international actuel. Seulement quelques sous du prix payé pour votre café ou votre banane parviennent jusqu’à la personne qui les a cultivés. Le système du commerce équitable permet de multiplier ce montant de six à dix fois.

            Deuxièmement, les producteurs de produits équitables ou biologiques perçoivent une prime d’environ dix pour cent, ajoutée à leur paie et destinée à des projets communautaires dans les écoles et les cliniques, à l’achat de nouveaux équipements et à la participation à des formations, par exemple. La prime a également servi pour la recherche agricole dans le but de contrer les effets du réchauffement climatique. Grâce à Fairtrade International, organisme établi à Bonn, en Allemagne, et à ses partenaires internationaux, le système du commerce équitable est aussi parvenu à soutenir financièrement des agriculteurs lors de divers phénomènes météorologiques et de l’apparition de nouvelles maladies causées par les changements climatiques.

            Les produits équitables proviennent souvent de coopératives rurales, et le processus favorise le leadership, la transparence et la démocratie. Des mesures supplémentaires sont prises afin de s’assurer de la présence de femmes dans des fonctions de pouvoir au sein de chaque coopérative, et ce, dans le but de combattre la traditionnelle dominance masculine dans la société. Bien sûr, le commerce équitable interdit le travail des enfants, en plus de prévoir une amélioration de la sécurité des travailleurs.

            La hausse de popularité pour les produits équitables dans la dernière décennie fait en sorte qu’il est maintenant possible de trouver facilement des aliments communs, comme le thé et le café, qui sont vendus dans les supermarchés et les magasins à grande surface. Bien sûr, les commerces écologiques ou d’alimentation saine en auront aussi en stock, tout comme les magasins Dix Mille Villages situés un peu partout au Canada, et même à quelques endroits aux États-Unis. Si vous désirez acheter autre chose que ces produits de tous les jours, il faudra alors un peu plus de recherches et d’arrangements, mais il est aussi possible de se procurer des fruits et des légumes, des vêtements, des ballons de sport, du vin et d’autres boissons, des fleurs, des épices, des fruits séchés et plus encore, tous équitables.

            Une hausse de la vente de ces produits est également synonyme de la baisse du prix de ceux-ci. En tant qu’ancien gérant d’un magasin équitable, je sais qu’un sac de grains de café autrefois vendu à 18 $ coûte aujourd’hui jusqu’à 5 $ de moins! Si vous habitez dans de grandes villes telles que Vancouver, Toronto et Montréal, vous avez un plus grand accès aux produits équitables; si vous recherchez un produit dans votre petite municipalité, il y a tout de même divers moyens pour l’obtenir, par exemple à des événements particuliers occasionnels pour la vente de bananes ou de fleurs cultivées par le commerce équitable, ou simplement en visitant des marchands locaux et en tentant de les rallier à votre cause afin qu’ils importent régulièrement des produits équitables.

            Le principal problème est le suivant : le nombre de produits issus du système du commerce équitable est nettement supérieur au nombre de produits qui sont bel et bien vendus comme équitables. Nous devons encourager la vente des produits de nos partenaires du Sud!

Les écoles équitables

Il est facile d’obtenir ce statut avec l’aide de Fairtrade Canada ou de Fairtrade America. Formez d’abord un petit comité composé de quelques élèves, d’au moins un enseignant et d’un administrateur, puis faites en sorte que la salle du personnel et la cafétéria offrent trois choix équitables (ex. : café, thé et sucre). Placez des affiches de renseignements dans l’école et organisez au moins un événement axé sur le commerce équitable chaque année. Renseignez votre voisinage ou votre collectivité sur les démarches que vous avez entreprises. Une application en ligne conçue par les organismes mentionnés plus tôt permet de rendre tout ce processus officiel.

Change-t-on vraiment les choses?

Le système du commerce équitable permet-il réellement d’améliorer la qualité de vie des producteurs des pays du Sud? Lorsque des enseignants ou des directeurs posent cette question, ils ne veulent pas entendre une citation tirée d’un manuel. Ils préfèrent plutôt constater par eux-mêmes les avantages du commerce équitable. Ainsi, des organismes canadiens de commerce équitable ont entrepris la promotion et l’organisation de « visites des origines » pour découvrir des coopératives productrices de café, de cacao, de bananes, de mangues, de sucre et d’autres produits, toutes établies en Amérique centrale et en Amérique du Sud, ainsi qu’aux Caraïbes.

            J’ai moi-même effectué une « visite des origines » au Pérou, en 2016. J’étais accompagné d’une dizaine d’autres militants, de gens d’affaires et de leaders institutionnels provenant de tous les coins du Canada. Nous avons été témoins de plusieurs des situations mentionnées dans le présent article. Dans mes présentations, je parle d’une coopérative de production de bananes que nous avons visitée. Nous y avons appris que les résidents du pays perdaient de l’argent sur chaque banane vendue avant de s’impliquer dans le commerce équitable, et ce, parce que les prix sur le marché étaient moins élevés que le coût de production.

            Nous avons également vu les dispositifs de sécurité du système de production installés par les résidents, comme de l’équipement pour protéger leurs épaules lorsqu’ils coupent et attrapent les régimes de bananes et des systèmes de poulies pour transporter les régimes aux zones de lavage et de triage afin que les travailleurs n’aient pas à porter de lourdes charges dans des conditions de chaleur et d’humidité extrêmes. Nous avons aussi constaté que les femmes faisaient preuve d’un plus grand leadership : elles étaient guides lors de nos visites et nous ont présenté leurs coopératives.

            Sans une entente plus juste, il sera difficile de convaincre les producteurs des pays du Sud de rester sur leurs terres; leurs perspectives d’avenir se résument à une pauvreté continue, une diminution de la production et un plus grand isolement, car le monde s’urbanise à un rythme incroyable.

Passez le mot

Le commerce équitable peut créer un courant et susciter de réels changements, mais il faut faire preuve d’engagement. Les écoles sont l’endroit idéal pour effectuer de la sensibilisation, car elles permettent de le faire avec passion, enthousiasme et plaisir.

            Comme je l’ai appris après de nombreuses visites dans des salles de classe, inviter quelqu’un qui présente aux élèves et aux enseignants un enjeu mondial peut réellement avoir un effet à long terme, surtout si l’invité offre une ressource avec laquelle il est possible d’expérimenter : un jeu, de jolies photographies prises lors d’une expédition dans un pays du Sud, ou même un conférencier originaire de l’un de ces pays. Récemment, lorsque je me suis adressé à une classe d’étudiants à l’université, plusieurs d’entre eux m’ont reconnu comme étant « le type du commerce équitable » qui avait visité leur école secondaire des années auparavant. Ils se souvenaient des chandails équitables qu’ils avaient sérigraphiés, des ballons de sports avec lesquels ils avaient joué dans les gymnases ainsi que des muffins aux bananes et aux pépites de chocolat que nous avions servi lors d’une assemblée scolaire.

            Un autre avantage de répandre le militantisme pour le commerce équitable dans les écoles est la présence de jeunes citoyens. Nous demandons aux élèves d’être de bons gardiens de la terre, de l’air et de l’eau, d’être de bons citoyens dans leurs collectivités et de bons amis pour les jeunes qui les entourent. De nombreuses écoles sont préoccupées par leurs environnements physiques, économiques et environnementaux. Les discussions au sujet du commerce équitable et les gestes posés pour l’encourager permettent de conscientiser les jeunes sur les enjeux à la fois locaux et internationaux, même s’ils semblent bien éloignés.

Découvrir le commerce équitable peut être amusant, tout comme changer le monde… Parlez-en à votre école!

Zack Gross est coordonnateur des relations avec les collectivités pour Fair Trade Manitoba, un programme du Manitoba Council for International Cooperation (www.mcic.a). Il est l’ancien président du réseau canadien du commerce équitable et membre du conseil d’administration de Fairtrade Canada. Oui, c’est bien Zack qui porte un costume de banane pendant une présentation.

Catherine Gill est diplômée du baccalauréat en traduction professionnelle de l’Université de Sherbrooke.

Box on page 4

Les réseaux du commerce équitable

Le système de commerce équitable international comprend Fairtrade International, ses membres ainsi que ses partenaires. Lorsque Fairtrade International reconnaît qu’une entreprise ou un organisme donne l’exemple idéal, il lui accorde son logo. Voici d’autres systèmes fiables : les étiquettes de petits producteurs, l’Organisation mondiale du commerce équitable, la Fair Trade Federation, Fair Trade USA, UTZ, la Rainforest Alliance ainsi que les marques « équitables » et de « commerce direct » sans étiquette.

Aux États-Unis, les principaux organismes sont le partenaire américain de Fairtrade International, Fairtrade America (www.fairtradeamerica.org), basé à Washington DC, et le Fair World Project (www.fairworldproject.org), basé à Portland, en Oregon. Ces deux organismes offrent des programmes et du matériel pour appuyer les gestes posés par les collectivités et les écoles afin d’encourager le commerce équitable.

Fairtrade Canada (www.fairtradecanada.ca) et le Réseau canadien du commerce équitable (www.cftn.ca/fr) gèrent un grand nombre de programmes qui acordent officiellement le statut « équitable » à des écoles, des campus, des villes, des lieux de travail, des groupes religieux, des ambassadeurs et des événements. Une école équitable comporte un petit comité qui s’assure que des produits équitables tels que du café, du thé, du sucre et du chocolat chaud sont présents dans la salle du personnel, à la cafétéria et pendant les événements scolaires. Des programmes éducatifs et des affiches de renseignements garantissent que tous ont des connaissances sur le commerce équitable et sont conscients qu’ils se trouvent dans une école équitable. Aujourd’hui, le Canada compte 18 écoles équitables, situées au Québec, en Ontario, au Manitoba et en Alberta. D’autres écoles sont actuellement en processus d’obtention de ce statut.

Si l’idée d’inviter un conférencier à votre école ne semble pas réalisable, sachez que chacun des organismes pour le commerce équitable nommés dans le présent article offre d’excellents outils de promotion et des sources de renseignements. Ils gèrent aussi des programmes dans lesquels les écoles peuvent s’impliquer, comme l’Halloween et la Saint-Valentin équitables, ou encore la journée mondiale du commerce équitable en mai. Leurs sites Internet comprennent également des vidéos qui pourraient remplacer la présentation d’un conférencier.

No comments yet

Leave a Reply


Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (0) in /home/greenteacher/profsverts.com/wp-includes/functions.php on line 5464