L’écoulement des eaux de tempête : comprendre les impacts écologiques de changer les utilisations du sol

par Joan Chadde
Traduit par Jocelyne Dickey
Quand s’étendent les communautés, les nouveaux centres commerciaux fleurissent alentour, les grands stationnements apparaissent petit à petit dans le paysage et les signalisations croissent comme des mauvaises herbes. Une architecture taillée sur un même patron dans laquelle les grandes surfaces remplacent les centres historiques des villes. Avec le milieu ainsi construit, on acquiert une nouvelle image où le milieu naturel change aussi, mais de quelle façon?
Je voulais que mes élèves du secondaire apprennent sur ces changements dans leur communauté pour qu’ils puissent comprendre mieux les conséquences de désirer une autre restauration rapide ou un autre petit centre commercial de plus. Comme professeur de sciences, j’avais besoin de trouver une manière de relier l’apprentissage sur l’usage du sol et le caractère de la communauté avec mon curriculum en sciences au secondaire. J’ai décidé de construire un module sur l’écoulement des eaux de tempête parce que les substances polluantes déversées dans les lacs et les rivières par l’écoulement des eaux de tempête constituent l’une des causes de la pollution de l’eau. De plus, l’écoulement des eaux de tempête est quelque chose que les élèves peuvent voir et sur lequel ils peuvent agir facilement.
Objectifs
Le module d’eau de tempête suggère des problèmes et des solutions que les élèves affrontent chaque jour mais auxquels ils ne pensent que rarement. Plusieurs élèves ne sont pas conscients que les changements dans l’usage du terrain dans leurs communautés sont planifiés ou non. À la fin de l’étude, les élèves seront capables de :
- Décrire les manières par lesquelles l’être humain change l’environnement et décrire quelques conséquences possibles de ces changements.
- Expliquer l’effet de l’agriculture et du développement urbain sur les écosystèmes.
- Décrire comment les changements dans l’usage et la couverture du sol changent l’apparence et le caractère de la communauté et affectent son environnement.
- Expliquer comment l’asphaltage augmente l’écoulement vers les rivières, les lacs et les régions côtières.
- Décrire comment l’écoulement des eaux de tempête peut réduire la qualité de l’eau des ruisseaux, des lacs et des eaux côtières, affectant la pêche sportive et commerciale, altérant les rivages pittoresques et causant la fermeture des plages.
- Expliquer comment une augmentation de l’écoulement des eaux de tempête réduit la recharge des aquifères, diminuant potentiellement le niveau phréatique et causant un impact sur les puits privés destinés à la consommation humaine.
- Utiliser des mesures pour décrire le monde réel et résoudre des problèmes.

Je débute le module en demandant aux élèves ces questions :
- Comment la croissance de la communauté affecte-t-elle la couverture du sol?
- Comment ces changements dans la couverture du sol affectent-ils la quantité, la qualité et la distribution de l’écoulement des eaux de tempête?
- Comment la création de plus d’asphaltage affectera-t-elle la nappe phréatique et les puits destinés à la consommation humaine?
- Comment la perte de végétation naturelle le long des rives des cours d’eau affectera-t-elle la qualité de l’eau des rivières et des lacs et comment altérera-t-elle l’écosystème aquatique?
- Comment tous ces changements affecteront-ils l’apparence et le caractère de la communauté?
Investiguer l’écoulement
L’écoulement des eaux de tempête se produit quand l’eau de pluie ou de fonte de la neige reflue à la surface du sol au lieu de pénétrer à l’intérieur du sol. En refluant sur les routes, les gazons, les stationnements et les constructions, l’eau recueille les fertilisants, les pesticides, la saleté, les abrasifs pour les routes, l’huile à moteur et les déchets d’origine animale. Souvent, ces contaminants sont transportés aux lacs, aux ruisseaux, aux rivières, aux marais ou aux eaux côtières des environs. Dans certaines villes, toute eau de pluie qui pénètre dans un collecteur d’eau pluviale se mélange aux eaux locales sans être traitée, ces mêmes eaux que les gens utilisent pour nager, pêcher et même possiblement boire cette eau. Dans les villes qui ont un système combiné d’aqueduc et de collecteurs d’eau de pluie, des millions de gallons d’eaux résiduelles non traitées ou partiellement traitées peuvent être relâchés dans les lacs et les rivières durant les longues tempêtes quand les usines de traitement des eaux usées se trouvent surchargées.
Je démontre le mouvement de l’écoulement avec un simple modèle de bassin que je crée en utilisant une toile de plastique (une nappe de pique-nique ou un rideau de douche sont aussi adéquats) étendue sur des feuilles de papier journal (On peut aussi utiliser un modèle de bassin EnviroScape® déjà prêt à l’usage). J’invite la classe à se regrouper autour pendant que je fais couler « de la pluie » sur le modèle en utilisant des arrosoirs ou des tasses pour démontrer comment se déplace l’écoulement en descendant vers les rivières et les lacs.
Ensuite, j’utilise le jeu « la métaphore des eaux de tempête » pour que les élèves pensent aux contaminants potentiels dans les eaux de tempête. Chaque groupe de trois ou quatre élèves reçoit un des articles suivants et doit dire à la classe comment cet article est en relation avec les eaux de tempête :
- Auto jouet (huile d’auto, gazoline, antigel)
- Laisse d’animal de compagnie (déchets produits par les animaux de compagnie)
- Pelle à neige (abrasifs pour les routes)
- Maison jouet (fertilisants et pesticides pour les gazons)
- Sac de nourriture rapide (restes, ordures)
- Gazon en plastique ou balle de golf (fertilisants et pesticides à gazon, jardins et exploitations agricoles)
- Un gros pinceau (peintures et dissolvants versés dans les égouts pluviaux)
- Un paquet de semences (le terrain découvert contribue aux sédiments comme le sable et le limon
- Bulldozer jouet (sédiments d’une nouvelle construction)
- Papier hygiénique (restes d’origine humaine que les usines de traitement des eaux rejettent)
Après avoir discuté des eaux de tempête – d’où elles viennent et où elles vont – j’amène ma classe pour une petite promenade à l’extérieur afin d’identifier les zones qui peuvent contribuer à l’écoulement et pour discuter des types de contaminants qui pourraient être entraînés à partir de ces zones au cours d’eau le plus près. Quand c’est possible, nous faisons cette promenade pendant qu’il pleut ou juste après. Je l’assimile à être des détectives environnementaux cherchant des pistes ou évidences. Un jour, alors que nous marchions vers la rivière près de l’école, le département d’entretien était en train de peindre le terrain de football et un travailleur rinça le pulvérisateur à peinture dans le stationnement. En voyant un panache de peinture blanche descendre la rivière, les jeunes reconnurent rapidement la source de contamination. C’était une peinture soluble dans l’eau, non toxique, mais nous avons étiqueté les conduits d’évacuation et nous avons alerté le superviseur de l’entretien sur le problème potentiel. Si vous pouvez localiser dans votre communauté les canalisations qui déversent les eaux de tempête, vous pouvez avoir des opportunités semblables de voir un panache d’eaux contaminées évacuées dans une rivière ou un lac.
Utiliser les meilleures pratiques de gestion
Les élèves investiguent l’impact potentiel du changement dans la quantité et dans la qualité de l’eau superficielle. En tant que classe, nous faisons un remue-méninge sur les différents usages du terrain et nous énumérons les contaminants potentiels associés avec chacun d’eux. Je rappelle aux élèves que les changements dans l’utilisation du terrain ne sont pas intrinsèquement mauvais et que cela dépend de la façon dont ils sont mis en œuvre. Les meilleures pratiques de gestion (MPGs) sont des méthodes structurelles ou non structurelles pour prévenir ou réduire le mouvement de l’écoulement transportant des sédiments, des nutriments, des pesticides et d’autres contaminants de la terre à l’eau de surface. Nous identifions différentes MPGs pour chaque usage du sol (voir le tableau « Contrôle de l’écoulement : Meilleures pratiques de gestion »).
Les étudiants reçoivent la tâche d’aller dans la communauté pour photographier trois MPGs utilisées pour protéger la qualité de l’eau et trois exemples d’endroits où les MPGs auraient dû être adoptées mais sont absentes. Les élèves apprennent à lire le paysage pour identifier des bassins de sédimentation pour capturer l’eau d’écoulement des grands stationnements, des canaux de drainage de végétation ou de roches alignées et des palissades contre l’érosion, qui maintiennent le sol contre les perturbations reliées à la construction à l’extérieur des canaux aquifères. Certains notent la présence de zones tampon de végétation sur les rives et des jardins de pluie pour capturer l’écoulement des stationnements. Les élèves écrivent une courte description de chaque photo illustrant la MPG ou recommandent une MPG précise si celle-ci est absente.
Je révise avec les étudiants une partie des décisions de planification et de conception qui ont été prises dans notre communauté, en discutant les tendances de croissance locales et comment elles affectent directement notre bassin. En utilisant le « Guide de conception pour améliorer l’apparence de la communauté et pour protéger les ressources naturelles », nous voyons des exemples et des alternatives à l’expansion urbaine (d’autres livres ou pages web sur la conception de la communauté ou le caractère de la communauté pourraient être utilisés ou on pourrait demander aux élèves de rechercher sur le web des sujets reliés à l’expansion urbaine et de ramasser des photos pour les partager en classe). C’est important pour les élèves de comprendre l’expansion visuellement et non seulement verbalement. Aussi, je leur demande d’identifier le nouveau développement dans notre communauté et de le documenter avec des photos digitales. Ensuite, les élèves choisissent une photo et font des recommandations pour minimiser les impacts visuels et environnementaux du nouveau développement. Ils impriment la photo, posent un papier à décalque par-dessus et y dessinent les parties de la scène qu’ils désirent conserver tel quel et ajoutent des recommandations de « meilleures pratiques » pour montrer comment on pourrait améliorer le nouveau développement pour mieux l’incorporer dans la communauté et minimiser l’impact sur la qualité de l’eau et sur les autres impacts environnementaux.
Calculer l’écoulement
S’il reste du temps, je demande aux élèves de calculer la quantité d’écoulement des eaux de tempête de l’école. Premièrement, ils mesurent l’édifice de l’école et transfèrent les dimensions sur du papier quadrillé. Ils estiment ensuite la surface de l’édifice de l’école en calculant le nombre de carrés qu’il occupe. Pour obtenir le volume d’eau qui tombe dans cette région durant un événement de pluie, ils multiplient la surface par la hauteur de la pluie de la manière suivante : Mesures américaines (par pouce de pluie)
- Surface du toit en mètres carrés x 0.8333 pieds (1 pouce) = un pied cube
- Pieds cubes x 7.84 = volume en gallons américains
Mesures métriques (par centimètre de pluie)
- Surface du toit en mètres carrés x 0.01 m (1 cm) = mètres cubes
- Mètres cubes x 1,000 = volume en litres
Je demande aux élèves : « Est-ce que toute la pluie qui tombe sur le terrain de l’école arrivera à la rivière ou au lac? ». J’expose le tableau « Pourcentage d’écoulement pour différents types de couverture du sol » afin de démontrer que le type de couverture du sol détermine quelle quantité de précipitation s’y infiltre et combien coule. D’autres facteurs qui affectent l’écoulement sont le type de terrain et son taux d’infiltration, l’intensité et la quantité d’écoulement, si le sol est gelé ou saturé, si la forêt est un boisé jeune à croissance rapide qui utilise beaucoup d’eau ou une forêt mature à croissance lente, la pente du terrain et la quantité de compaction du sol (les gazons des zones résidentielles très denses sont assez compactés, limitant énormément l’infiltration). Je montre aux élèves des photos aériennes de notre communauté, prises en1975 et en 2002, qui illustrent clairement les changements dans la couverture du sol dus à des changements d’utilisation du sol (les photos aériennes peuvent être obtenues auprès des agences locales de gestion du terrain ou auprès des bureaux de planification de la ville et aux États-Unis auprès des bureaux de comté du Service de conservation des ressources naturelles du USDA).

Finalement, les étudiants abordent le calcul du volume total d’écoulement du terrain de l’école au cours d’une année. Premièrement, nous regardons une photographie aérienne ou une esquisse d’ingénierie de tous les terrains de l’école et nous faisons attention aux différentes couvertures du sol : pavage/stationnements imperméables, trottoirs et toits, terrains de football/gazon, petite surface boisée. Je laisse les élèves mesurer librement la surface de chaque type de couverture avec des règles métriques et des calculatrices (les mesures pourraient être effectuées à partir de photos aériennes si une légende des distances est disponible). Après avoir obtenu ces mesures, les élèves calculent la surface totale de chaque type de couverture, qu’ils multiplient par la quantité des précipitations annuelles moyennes et par le facteur d’écoulement approprié (le pourcentage de précipitation qui coule, comme le démontre le tableau « Pourcentage d’écoulement pour des types distincts de couverture du sol »). Finalement, les élèves convertissent ces volumes en litres ou gallons d’écoulement. (Voir le tableau « Calculer l’écoulement des édifices et des terrains de l’école »).
Nous terminons ce module avec une séance de remue-méninge sur les manières de réduire l’écoulement des terrains de notre école, comment planter un jardin de pluie, installer un toit vert, utiliser de l’asphalte imperméable dans le stationnement et planter des arbustes et des arbres. Nous étiquetons aussi les décharges d’eau de tempête autour de l’école.
Plusieurs élèves ne sont pas conscients que les changements dans l’utilisation du sol dans leurs communautés peuvent affecter la qualité de l’eau des ruisseaux, des rivières et des lacs avoisinants. Après ce module, ils sont capables de mieux relier les changements dans l’apparence de la communauté avec les changements écologiques résultant des changements dans la couverture du sol.
Plus d’investigations sur l’utilisation du sol
Les idées suivantes sont d’autres idées avec une base scientifique pour mesurer les impacts écologiques à changer les utilisations du sol :
- Mesurer la différence dans la qualité de l’eau dans des rivières avec des eaux s’écoulant du haut et du bas d’une ville, d’un centre commercial ou d’autres utilisations du sol, en utilisant des macro invertébrés comme bio indicateurs. La page web de EPA est un bon site pour commencer à apprendre sur des méthodes d’échantillonnage, d’identification, de programmes de surveillance publique et plus : <http://www.epa.gov/wbioindicators/html/invertebrate.html>.
- Identifier des changements dans l’utilisation du sol de votre communauté et discuter les conséquences visuelles potentielles et environnementales. Voir l’activité « Changer le sol » du module Les apparences sont importantes ! dans <http://wupcenter.mtu.edu/education/land_use/index_looks_count.htm>.
- Comparer la diversité des plantes dans les régions urbaines avec celle de régions naturelles non altérées. Voir « Étude de biodiversité : Altéré vs non altéré » du module Les apparences sont importantes ! dans <http://wupcenter.mtu.edu/education/land_use/index_looks_count.htm>.
- Utiliser des œufs d’oiseaux artificiels (faits avec de la pâte à modeler et disposés par groupes de trois œufs sur une série de coupes parallèles) pour mesurer la variabilité dans la prédation d’œufs disposés par des oiseaux qui nichent sur le sol selon que la distance respective au développement humain est réduite. Voir « Investigation de la prédation de nids artificiels » du module Les apparences sont importantes ! dans <http://wupcenter.mtu.edu/education/land_use/index_looks_count.htm>.


Joan Chadde est la coordinatrice du programme d’éducation du Centre Western Upper Peninsula pour les sciences, les mathématiques et l’éducation environnementale à l’Université technologique du Michigan à Houghton, Michigan. Elle remercie les professeurs Gary Cousino ( École secondaire Hart, Rochester Hills, MI), Betty Cangemi (Institut du baccalauréat L’Anse, L’Anse, MI) et Sharon Bajema (Institut du baccalauréat Ottawa Hills, Grand Rapids, MI) pour leurs contributions à cette leçon. D’autres activités additionnelles sur les bassins et l’utilisation du sol par Joan Chadde peuvent être trouvées dans le module Michigan Environmental Education Curriculum Support (MEECS) Module sur la qualité de l’eau disponible en ligne sur <www.michigan.gov/deq/0,1607,7-135-3307_3580_29678—,00.html>.
Traduit par Jocelyne Dickey, biologiste et professeure de biologie et informatique à la retraite, traductrice bénévole depuis 2004, Québec
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