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L’éducation au bord de la mer

Par Grace Satterfield

Traduit par Marie-Sophie Couture

UNE FEMME SE PENCHE et scrute intensément les vagues qui lèchent le sable du rivage de Sanibel Island, cherchant des trésors de l’océan tels que des conques de Floride en spirale et des buccins de foudre en torsade. Quelques instants plus tard, un coup de tonnerre attire son attention vers la mer. Alors qu’elle fixe l’eau, une énorme masse émerge de l’océan juste devant elle et se traîne lentement hors de l’eau et sur la plage. La femme attrape son sac de coquillages et fait un signe frénétique de la main à sa fille qui se lève de sa serviette pour regarder la masse couverte d’algues s’arrêter et se creuser un nid dans le sable sous elle. La mère et la fille assistent au spectacle inhabituel d’une tortue caouanne qui pond ses œufs durant le jour, probablement pour éviter la tempête qui approche.

Comme la plupart des caouannes, cette tortue de quatre pieds de long est recouverte d’une carapace fuselée, dont la surface brune est parsemée de pouces-pieds. Ce nid est l’un des cinq qu’elle creusera successivement pendant la saison de nidification estivale; chacun d’eux produira environ 110 éclosions. Cette tortue a fort probablement migré sur des centaines de miles pour creuser son nid. Elle prendra ensuite deux années de vacances bien méritées avant de nidifier de nouveau.

La mère et la fille, tout excitées, ont appelé la ligne directe pour la nidification des tortues de Sanibel pour signaler l’emplacement du nid. Les bénévoles sont arrivés en moins d’une heure et ont commencé à surveiller cette inhabituelle nidification de jour. Après avoir enfin terminé d’enterrer ses œufs, la tortue caouanne retourne lourdement dans l’océan en se traînant, laissant des traces aussi profondes que celles d’un petit tracteur. Les bénévoles ont immédiatement mis un grillage autour du nid pour protéger les œufs des prédateurs et des amateurs de plage non avertis. Celui-ci possède des ouvertures assez grandes pour permettre aux petits de sortir et de regagner la mer deux mois plus tard. Une tortue caouanne peut vivre jusqu’à 90 ans, ce qui est assez long pour qu’une grand-mère puisse nidifier en même temps que ses petites-filles, même si la caouanne ne peut commencer à se reproduire que vers l’âge de 30 ans.

Malgré leur longévité, les tortues caouannes sont menacées. De nombreux petits n’atteignent pas la mer en raison des prédateurs comme les crabes fantômes et les oiseaux marins, ou de l’ingérence humaine. Les tortues de mer peuvent être déroutées par les lumières artificielles sur la côte ou par des obstacles fabriqués par l’humain, comme des chaises de plage et des châteaux de sable. Le taux de survie des petites tortues caouannes serait d’environ 1 sur 10 000 si les nids n’étaient pas protégés et que leur émergence n’était pas surveillée. Grâce aux efforts des protecteurs de l’environnement, le taux de survie aujourd’hui est plus près de 1 sur 1000, ce qui ne correspond encore qu’à un seul descendant survivant par tortue tous les 20 ans.

Lorsque la tortue caouanne est enfin retournée à la mer et que l’équipe de bénévoles a terminé de sécuriser le nid, la mère et la fille rentrent à leur appartement en copropriété sur la plage où elles commencent immédiatement à chercher de l’information sur la conservation des tortues caouannes. Pendant ce temps, l’orage s’installe à l’extérieur et la pluie se déverse sur le nouveau nid de tortue.

Les recherches de la mère et de la fille ont révélé l’importance négligée de la plage en tant qu’habitat naturel unique et ont également souligné que la plage est un emplacement optimal pour l’éducation environnementale. Le docteur Blair Witherington, un biologiste spécialisé dans les tortues de mer, explique que « les enfants sont de plus en plus séparés de la nature et connectés à la technologie. Il leur manque d’importantes expériences en nature. » Il affirme que la plage a bien plus à offrir que le soleil et le sable. C’est l’occasion de sortir d’un manuel scolaire pour enseigner à nos enfants la faune des plages et l’importance de préserver les écosystèmes côtiers.

Le docteur Witherington et sa femme, Dawn Witherington, illustratrice scientifique, ont passé leurs carrières sur les plages à apprendre, puis à améliorer leurs livres Florida’s Living Beaches: A Guide for the Curious Beachcomber et Our Sea Turtles: A Practical Guide for the Atlantic and Gulf. Le docteur Witherington décrit son travail de protecteur de tortues et de ramasseur d’épaves passionné comme une aventure sans fin sur la plage. Il ajoute : « L’océan est tellement dynamique. Il change selon la saison et son climat général. Vous pourriez passer une vie entière à étudier la vie à la plage. Et le plus merveilleux dans tout cela, c’est que vous n’avez pas besoin de porter de souliers pour le faire. »

À l’intérieur d’un écosystème côtier

Bien qu’il puisse être difficile de prendre sur le fait une tortue caouanne en train de nidifier, la vie courante de la plage regorge de faits intéressants et d’occasions éducatives. Regardez au-dessus de l’océan et vous pourriez repérer des pélicans bruns. Eux, ils vous ont assurément repéré. Les pélicans bruns peuvent voir un poisson à une distance de 20 à 60 pieds. Ils volent en ligne droite ou en formation en V près de l’eau pour profiter de « l’effet de sol ». Les pilotes imitent ce comportement, puisque « l’effet de sol » facilite le vol en comprimant l’écoulement d’air et en réduisant la résistance, qui est une force contraire au mouvement. Lorsqu’un poisson peu méfiant est choisi, le pélican plonge sur sa proie, ramasse le poisson dans sa poche, amerrit pour vider l’eau de mer de son bec, puis avale le poisson entier, tête première, pour éviter d’être blessé par ses écailles tranchantes.

Le pélican brun, fréquent sur les côtes de l’Atlantique et du Pacifique, est l’une des nombreuses espèces d’oiseaux que vous pouvez vous attendre à trouver à la plage. Vous pouvez effectuer des recherches pour connaître les autres oiseaux de saison, ou même vous procurer un guide sur les oiseaux de votre région. L’observation des oiseaux peut susciter des questions fondamentales en science de l’environnement. Par exemple, où se situe une espèce dans la chaîne alimentaire? Migre-t-elle? Est-elle en voie d’extinction? Les réponses à ces questions fondamentales deviennent mémorables pour les enfants lorsqu’elles sont combinées à l’expérience d’observer réellement l’oiseau.

Maintenant, baissez les yeux vers le sable et vous apercevrez peut-être une coquille de palourde vide avec un trou. Cette coquille était le squelette d’un organisme du phylum des mollusques; elle lui servait de couche protectrice externe. Toutefois, le trou caractéristique est le seul témoin restant de la mort atrocement lente de la palourde aux mains d’un prédateur impitoyable : l’escargot.

Les natices communes et les escargots œil de requin progressent tant bien que mal sur le sable, « flairant » les proies, y compris les protéines des palourdes. Une palourde tentera de fuir à la surface du sable à l’approche d’un escargot. Par conséquent, une course palpitante, quoique lente, s’ensuit entre le prédateur et la proie. Si la palourde malchanceuse est plus lente que l’escargot, celui-ci l’enveloppera avec son pied et libèrera un acide qui ramollira suffisamment la coquille de la palourde pour y percer un trou. Il libèrera ensuite des enzymes qui digèrent les muscles adducteurs de la palourde. Sans ces muscles, la palourde s’ouvre comme un coffre-fort percé et, bon appétit, la chaudrée de palourde est servie.

Alors que les ramasseurs d’épaves ratent souvent cette attaque au ralenti, vous pouvez trouver et ramasser les restes de coquilles de palourdes vides et d’autres coquillages colorés le long de la côte. Vous pouvez initier les enfants à la biologie des coquilles grâce à des quêtes de coquillages. Faites des recherches sur les coquillages que vous avez trouvés dans votre région, classez-les de communs à rares et incluez des faits intéressants sur ces différents coquillages. Vous pouvez même attribuer des points pour la découverte de certains coquillages pour en faire une compétition, ce qui aide à impliquer les enfants plus âgés également!

Assurez-vous que vos élèves ou vos enfants comprennent que les coquilles vides jouent aussi un rôle dans l’environnement. La surface des coquilles peut devenir un microhabitat pour les algues, les herbiers, les éponges et les microorganismes. Certains poissons utilisent les grandes coquilles comme abri contre les prédateurs dans l’eau. De plus, les bernard-l’hermite peuvent utiliser d’autres coquilles comme maisons temporaires et les oiseaux ajoutent même des coquilles à leurs nids. La plupart des coquilles sont broyées dans les vagues par la marée pour devenir des grains de carbonate de calcium, composant principal du sable. Ce sable dérivé de coquilles fournit des habitats essentiels aux créatures de la plage (ainsi qu’aux vacanciers).

Bien que le ramassage d’épaves soit éducatif et agréable, il est important pour les collectionneurs de ramasser les coquillages sur la plage de manière sélective et avec modération. Le docteur Witherington suggère de prendre des photos de la plupart de vos trouvailles plutôt que de les retirer de la plage. Il déclare : « Nous ne pouvons pas oublier que les plages sont vivantes. »

Exploration plus poussée

De nombreuses destinations vacances populaires ont également des réserves fauniques et des centres de réadaptation pour la faune blessée. Certaines offrent même l’occasion d’interagir avec des bénévoles, tels que les protecteurs de tortues qui travaillent avec la Sanibel-Captiva Conservation Foundation. Sarah Lathrop, codirectrice de la Ding Darling Wildlife Society à Sanibel, encourage les vacanciers à effectuer des stages d’été dans une réserve faunique. Comme elle le dit si bien : « Apporter de l’aide à la faune peut être aussi simple que de ramasser les déchets que vous voyez le long de la plage. »

Les plages sont des destinations de choix pour les voyages de détente, mais les parents et les professeurs peuvent également intégrer des expériences en nature amusantes et inoubliables durant les excursions à la plage ou même sur rive de lacs intérieurs. Tout comme les côtes de l’océan, les rives d’un lac comprennent différents habitats qui abritent une faune abondante qui pourrait être une source d’inspiration pour l’observation d’oiseaux, la quête de plantes indigènes ou la chasse de moules d’eau douce.

Le docteur Witherington décrit la Terre comme une « vaste étendue sauvage. Chaque jour est différent. Vous ne pouvez jamais tout apprendre. » Mais nous pouvons offrir à nos enfants l’occasion d’essayer.

Grace Satterfield enseigne la biologie à des étudiants de premier cycle de l’Université du Tennessee et effectue des recherches sur les interactions entre les plantes et les microbes au Laboratoire national d’Oak Ridge, à Oak Ridge, dans le Tennessee.

Marie-Sophie Couture est étudiante de 3e année en traduction professionnelle à l’Université de Sherbrooke.

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