Protégeons nos récifs de corail
Par Melody L. Russell, Stanton Belford, Laura Crowe & David Laurencio
Traduction par Élyane Picard
Les écosystèmes peuvent varier grandement en taille : ils peuvent avoir des frontières définies, comme le bord d’un étang, ou en avoir de moins visibles, comme une prairie se transformant en montagne. On retrouve des écosystèmes dans tous les biomes terrestres, aquatiques et marins. Ces écosystèmes ne fournissent pas uniquement un habitat aux organismes : ils maintiennent aussi les flux d’énergie grâce aux chaînes alimentaires et aux cycles des substances nutritives. En tant qu’êtres humains, nous interagissons avec l’environnement de tous les organismes qui partagent notre espace et nous affectons ce dernier. Malheureusement, les écosystèmes très diversifiés de notre planète sont de plus en plus menacés à plusieurs endroits dans le monde. Si on laisse faire ces menaces à long terme, notre environnement, notre économie et notre qualité de vie s’en ressentiront au niveau local, puis global. Les récifs de corail représentent l’un des écosystèmes les plus variés et précieux sur Terre, mais aussi l’un des plus menacés. Actuellement, bien qu’ils représentent 1 % du fond océanique, ils fournissent un habitat à plus de 25 % de la vie marine, y compris aux cnidaires1. Dans l’océan, la survie d’environ un million d’espèces de plantes et d’animaux dépend des récifs de corail.
On peut se servir d’un cours sur les récifs de corail afin de présenter les effets des changements climatiques et de la pollution sur l’environnement. Le sujet permet aussi d’encourager la discussion sur le rôle que jouent les interactions humaines dans l’environnement.
Ce cours sur les récifs de corail est conçu pour donner l’occasion aux élèves du primaire et du premier cycle du secondaire d’explorer la biodiversité, les écosystèmes et le lien entre ceux-ci. On peut donner ce cours aux élèves du primaire et du premier cycle du secondaire, tout comme aux futurs enseignants. Son principal objectif est de permettre aux élèves de s’impliquer dans un cours qui traite des caractéristiques des écosystèmes pour la promotion d’une conscience environnementale.
L’écosystème des récifs de corail
On considère les récifs de corail, parfois appelés « les forêts tropicales de l’océan », comme l’un des inestimables centres de diversité de la biodiversité à l’échelle mondiale. Ils représentent aussi un écosystème extrêmement précieux pour les humains. Les récifs de corail génèrent plus de 30 milliards de dollars par année en biens et services au moyen d’activités comme le tourisme et la pêche2, 3. Malheureusement, 10 % des récifs de corail ont été considérablement endommagés de manière irréversible4. De plus, les deux tiers des récifs de corail dans le monde sont détruits par les changements climatiques et les activités humaines5. Plusieurs organismes comme les poissons, les crustacés, les échinodermes et les mollusques se servent des récifs de corail comme habitats de croissance. La protection de ces récifs est urgente et en parler en classe est un moyen de promouvoir une bonne gérance de l’environnement.
La symbiose est une association étroite entre deux ou plusieurs espèces. Cette association peut nuire à une espèce pendant que l’autre se développe, comme on le voit dans les cas de parasitisme. Il peut aussi y avoir une association où une certaine espèce en tire des avantages et l’autre, ni avantage ni tort, comme dans les cas de commensalisme. Une association profitant aux deux espèces se nomme le mutualisme.
Parmi les cnidaires, on retrouve les coraux, anémones de mer et méduses. L’appellation cnidaire suggère que ces organismes sont « piquants » : elle fait référence aux cellules urticantes présentes dans ceux-ci. Les cnidaires les plus connus sont les coraux et les anémones de mer, qui maintiennent une association mutualiste avec des protistes microscopiques qui se nomment zooxanthelles, c’est-à-dire une espèce de Symbiodinium. Leur association est vitale, sans nuisance dans un sens ou dans l’autre. Les coraux survivent dans des eaux pauvres en nutriments grâce à leur relation symbiotique avec les zooxanthelles, ces microalgues photosynthétiques6. Les coraux se développent habituellement dans les eaux claires et chaudes, généralement entre 18°C et 29°C, bien qu’une température entre 30°C et 35°C degrés puisse convenir à certaines espèces7. Durant de longues périodes de variations anormales de la température de l’eau, les zooxanthelles quittent les coraux, ce qui leur donne la couleur blanche8. Les coraux subissent énormément de stress pendant cette période et peuvent mourir si les températures anormales persistent. Lorsque le blanchissement touche les récifs entiers, on appelle ce phénomène un blanchissement de masse des coraux.
Un autre exemple que l’on peut montrer aux élèves est l’association entre le poisson-clown et l’anémone de mer. Fait intéressant, le poisson-clown ne s’associe qu’avec dix des multitudes d’anémones de mer présentes à travers les océans du monde entier. Cela signifie que la population des poissons-clowns est limitée par la présence de leurs hôtes mutualistes stricts. Par conséquent, plusieurs des 29 espèces de poissons-clowns connus sont endémiques. Par exemple, le poisson-clown à deux bandes (Amphiprion bicinctus) est endémique à la mer Rouge. Autrement dit, cette espèce particulière réside dans une seule région géographique du monde. En fait, à part dans la mer entourant la chaîne d’îles de la Papouasie-Nouvelle Guinée qui abrite dix espèces de poissons-clowns, on ne trouve la plupart des autres espèces qu’à quelques endroits précis dans le vaste océan.
L’étude des récifs de corail
On peut monter ce cours à l’aide des cinq étapes de la méthode d’apprentissage développée par l’étude de programme BSCS (Biological Sciences Curriculum Study). On appelle ces cinq étapes les cinq « E » : engagement, exploration, explication, élaboration et évaluation. Voici les objectifs de cette activité :
- Les élèves décrivent les caractéristiques des écosystèmes des récifs de corail et évaluent l’importance de la biodiversité en les entretenant.
- Les élèves illustrent les caractéristiques essentielles du mutualisme (un type de symbiose) que l’on retrouve chez les cnidaires.
- Les élèves étudient l’importance des interactions pour les écosystèmes marins et pour notre société.
Temps requis : Une ou deux périodes de cours, selon le calendrier des cours. On peut compléter l’activité en un bloc de 90 minutes ou en deux périodes de 45 minutes.
Sécurité :
- Assurez-vous que les élèves n’ont aucune allergie alimentaire.
- Les élèves doivent se laver les mains, puisqu’ils pourront, après l’activité, manger les modèles de polypes coralliens qu’ils fabriqueront.
Matériel nécessaire : La quantité est prévue pour une classe de taille moyenne, donc elle peut varier selon le nombre d’élèves. Chaque élève fabriquera son propre polype corallien. Tous les produits alimentaires se trouvent à l’épicerie locale.
- Échantillons ou images d’un corail séché
- Lien du vidéo YouTube du poisson-clown et de l’anémone de mer9
- Assiettes en carton (une par élève)
- Papier essuie-tout
- Verres (petits verres de 8 onces pour que l’enseignant y verse du sirop de chocolat)
- Cuillères
- Grosses guimauves (un grand sac) ou bananes (un régime)
- Réglisse (3 sacs de réglisse rouge ou noire)
- Biscuits Graham (2 boîtes)
- Sirop de chocolat (2 petites bouteilles)
- Craquelins (2 boîtes)
- Bonbons décoratifs ou sucre cristallisé (1 petit pot)
- Biscuits au sucre (2 boîtes)
- Cure-dents (1 boîte)
Matériel en cas de prolongation de l’activité, si le temps le permet :
- Revues sur la faune ou sur les plantes/animaux
- Ciseaux
- Colle
- Papier
Démarche
Engagement (10 minutes). Le cours commencera par l’engagement des élèves grâce à la vidéo ou à des images fournies par l’enseignant montrant des poissons-clowns dans leur habitat naturel. L’enseignant distribuera aux élèves des échantillons de corail séché afin qu’ils puissent noter les caractéristiques physiques des coraux, comme la texture, la couleur, la taille et la forme. Contactez un aquarium local pour vous procurer des échantillons de corail séché ou artificiel. Les élèves observeront différentes images de coraux durs et ils compareront ces images aux échantillons. Placez les élèves en équipes de deux et demandez-leur d’énumérer les caractéristiques observées sur les différents coraux. Ils peuvent se servir de feuilles d’observation ou de cahiers de sciences pour noter leurs remarques.
Exploration (35 minutes). Les élèves feront une recherche sur Internet sur les écosystèmes en équipe de deux à l’aide du site Webquest10. L’enseignant assignera un questionnaire Webquest précis sur le site QuestGarden11. En complétant l’activité Webquest, les élèves découvriront la structure et la forme des polypes coralliens. C’est un excellent questionnaire conçu pour démontrer l’impact des humains sur un écosystème. Les élèves peuvent établir un lien entre les activités humaines et leurs menaces sur l’écologie et les écosystèmes des récifs de corail. Ils peuvent également utiliser des loupes ou lentilles de grossissement afin d’observer les minuscules pores présents sur la surface des échantillons de coraux durs. De plus, ils examineront des images de polypes coralliens pour comprendre leur anatomie fondamentale comme la base, leur colonne, leur bouche et leurs tentacules. On utilisera les images pour parler de l’emplacement de ces polypes par rapport à l’animal corallien.
Explication (15 minutes). Le cours se poursuit avec la discussion sur l’association entre le poisson-clown et l’anémone de mer. Puisque les poissons-clowns sont de mauvais nageurs, ils deviendraient des proies faciles. Cependant, l’anémone de mer leur fournit une protection. Les élèves peuvent faire une recherche sur la multitude d’espèces et d’organismes que l’on retrouve dans les écosystèmes des récifs de corail et sur la manière dont ils interagissent. Les élèves décriront ensuite les caractéristiques d’un écosystème et donneront des exemples de divers écosystèmes.
Élaboration (25 minutes). Après l’observation des coraux durs, les élèves se concentreront davantage sur l’anatomie du polype corallien et commenceront une activité guidée d’investigation dans le but de concevoir leur propre modèle de polype corallien. On fournira à chaque élève une grosse guimauve (ou morceau de banane), plusieurs bâtons de réglisse, des biscuits Graham, un petit gobelet de sirop de chocolat, des craquelins, des bonbons décoratifs verts et un biscuit au sucre. L’enseignant doit distribuer tout le matériel et surveiller la quantité reçue pour chaque groupe. Les élèves réfléchiront sur ce que chaque élément de matériel fourni représente avant d’entamer la conception de leurs modèles de récifs de corail et polypes.
Chaque équipe devra utiliser le matériel fourni afin de construire deux polypes coralliens : l’un qui aura subi un blanchissement de corail et l’autre non. L’enseignant demandera aux élèves de dessiner des croquis dans leur cahier de sciences avant de commencer la fabrication des polypes. Le sirop de chocolat servira de colle et devra être étalé sur le biscuit Graham, qui représentera la base du polype corallien. Les élèves colleront la guimauve avec le sirop de chocolat à la base du polype pour représenter sa colonne. Ils placeront ensuite des tentacules de réglisse sur le dessus de la guimauve et des bonbons décoratifs verts sur le dessus et autour du polype pour représenter les zooxanthelles. Le biscuit au sucre illustrera le récif de corail situé en-dessous du polype corallien. Les zooxanthelles fournissent à leurs hôtes cnidaires des photosynthétats qui représentent parfois 90 % de la nutrition des cnidaires.
Les zooxanthelles reçoivent en retour des nutriments, du dioxyde de carbone et un substrat utilisé au soleil12. L’un des deux élèves de chaque équipe ne devra pas ajouter de bonbons décoratifs sur son polype afin de démontrer le blanchissement des coraux.
Après la fabrication de leurs polypes, les élèves les partageront. L’enseignant permettra aux élèves de comparer leurs polypes avec les autres et de remarquer les différences entre chacun. Il pourra aussi mettre l’accent sur la structure et la fonction des différentes parties des polypes. Les élèves devront expliquer quelles sont les ressemblances entre leur structure et celles des autres et comment ils ont démontré le blanchissement des coraux avec leur polype. L’enseignant leur demandera dans cette conversation pourquoi le polype sans bonbons décoratifs peut représenter le blanchissement des coraux. De cette façon, on introduira la discussion sur le blanchissement des coraux, qui est dans la plupart des cas le résultat des organismes photosynthétiques, les zooxanthelles, et des conditions environnementales anormales13. Pendant le cours, on peut insister sur l’importance des zooxanthelles et de la survie des espèces dans les récifs de corail. Sans les zooxanthelles, la relation symbiotique devient inexistante : ces organismes fournissent jusqu’à 90 % de l’alimentation des cnidaires et reçoivent en retour des nutriments et du dioxyde de carbone pouvant être converti en oxygène.
Les élèves peuvent réfléchir à des solutions pour diminuer le blanchissement des coraux et pour protéger l’environnement. Par exemple, la crème solaire provenant des touristes qui font de la plongée ou de la natation et les herbicides peuvent causer le blanchissement des coraux. Les élèves peuvent penser à des solutions de rechange pour ces produits afin de minimiser ou de prévenir le blanchissement des coraux pouvant être causé par les humains.
Le blanchissement de masse des récifs de corail entraîne des conséquences néfastes à travers le monde. Il est alors possible d’ajouter un élément géographique et culturel à l’activité scientifique, en demandant aux élèves d’examiner différents récifs et d’étudier en quoi les populations qui les entourent en dépendent pour la nourriture et la protection contre les tempêtes, les inondations et l’érosion des rives. Pour rendre le cours interdisciplinaire, l’enseignant peut par exemple demander aux élèves de chercher les dix plus grands récifs au monde14 et de les localiser sur une carte.
L’enseignant demandera aux élèves d’expliquer l’importance de la symbiose et du mutualisme dans les habitats marins, comme on l’aura vu chez les coraux et zooxanthelles, et avec l’association entre les poissons-clowns et les anémones de mer. Les élèves pourront aussi évoquer d’autres organismes possédant des relations semblables.
Mise en pratique supplémentaire et interdisciplinaire
Puisque la hausse de la température de l’eau entraîne des conséquences sur les récifs de corail et que ces changements de température sont attribués aux changements climatiques, les élèves pourraient discuter des stratégies et des organisations qui veillent à protéger les récifs de corail pour promouvoir une bonne gérance de l’environnement. Vous pouvez visiter le site Teach Ocean Science pour trouver des activités et des mises en pratique interdisciplinaires supplémentaires sur les récifs de corail15. Les élèves pourraient concevoir une fausse affiche publicitaire intitulée « Sauvons les récifs de corail », qui résumerait les facteurs nuisant aux récifs de corail. Ils pourraient également présenter des solutions de rechange respectueuses de l’environnement aux produits qui, une fois dans l’eau, peuvent détruire les récifs. Ou encore effectuer une recherche sur les conséquences économiques et politiques de la destruction des coraux sur l’économie mondiale et en discuter ensemble. Ils pourraient se lancer dans une simulation d’assemblée locale, où l’argumentation serait utilisée comme stratégie pédagogique. Cette simulation servirait à analyser comment promouvoir les solutions trouvées pour remplacer les produits néfastes et diminuer les facteurs responsables du blanchissement des coraux. Elle serait aussi l’occasion de mettre l’accent sur des mesures et des lois de conservation. Ce faisant, on doit attirer l’attention sur les conséquences des changements climatiques et traiter, plus largement, dans une autre simulation d’assemblée locale, de moyens d’en minimiser les effets et de protéger l’environnement.
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Melody L. Russell est professeure agrégée de l’enseignement des sciences dans le Department of Curriculum and Teaching de l’Université d’Auburn, en Alabama. Stanton Belford est professeur adjoint de biologie au Martin Methodist College, à Pulaski, au Tennessee. Laura Crowe est professeure de sciences physiques et étudiante de 3e cycle dans le programme d’enseignement des sciences à l’Université d’Auburn. David Laurencio est aussi étudiant de 3e cycle dans le programme d’enseignement des sciences à l’Université d’Auburn.
Le cours présenté ici a été adapté à partir du contenu de l’article en ligne « Anytime lesson plan: Build a coral polyp lesson » dans le site web de la California Academy of Science16 et a été donné par les auteurs, l’un d’eux étant diplômé en enseignement des sciences. Pour ce cours, les auteurs ont modifié le matériel, les ressources et quelques éléments du contenu en se basant sur les connaissances variées des auteurs. Ils l’ont aussi modifié pour que le cours s’applique aux élèves du primaire.
Élyane Picard est diplômée du baccalauréat en traduction professionnelle de l’Université de Sherbrooke.
Ce qui précède est une traduction de « Love Our Coral Reefs » qui a été publié en Green Teacher 107, Automne 2015.
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